Acrophobie, peur du vide ou vertige

C’est faux, ce qui fait que la chute est sans conséquence c’est un bon assureur. Un assurage dynamique et adapté à la configuration de la voie (vire, cade, etc) fait que la chute est sans conséquence.
Dans un gros dévers si l’assureur te « sèche » tu as beaucoup plus de chance de te faire une cheville quand dans une voie verticale avec un mauvais assureur.

Tu ne dois pas beaucoup grimper en dalle pour affirmer ça. alexmars parle de voies dans le 4-5, dans ces niveaux la majorité des voies ne sont même pas verticales mais couchées, qu’importe l’assurage quand de toute façon le grimpeur rencontre le rocher bien avant que la corde puisse jouer un rôle.

[quote=« J2LH, id: 1467419, post:76, topic:122468 »]

Tu ne dois pas beaucoup grimper en dalle pour affirmer ça. alexmars parle de voies dans le 4-5, dans ces niveaux la majorité des voies ne sont même pas verticales mais couchées, qu’importe l’assurage quand de toute façon le grimpeur rencontre le rocher bien avant que la corde puisse jouer un rôle.[/quote]

alexmar dit que la chute dans du 7/8 est presque toujours sans conséquence. C’est là que je dis que c’est faux.

Alors il ne faut pas tout citer « Et c’est tout à fait rationnel, car une chute dans le 7-8 est presque toujours sans conséquence, tandis qu’une chute dans le 4-5 l’est rarement » pour dire que c’est faux.

Par ailleurs je serais assez d’accord pour dire qu’une chute dans le 7-8 est presque toujours sans conséquence. Une chute dans le 4-5 également aussi d’ailleurs, heureusement. Il reste juste que chuter sur une dalle couchée a plus souvent des conséquences que de chuter dans un surplomb (et ce n’est pas mon coéquipier habituel qui me contredira).

[quote=« J2LH, id: 1467559, post:78, topic:122468 »]

Alors il ne faut pas tout citer « Et c’est tout à fait rationnel, car une chute dans le 7-8 est presque toujours sans conséquence, tandis qu’une chute dans le 4-5 l’est rarement » pour dire que c’est faux.

Par ailleurs je serais assez d’accord pour dire qu’une chute dans le 7-8 est presque toujours sans conséquence. Une chute dans le 4-5 également aussi d’ailleurs, heureusement. Il reste juste que chuter sur une dalle couchée a plus souvent des conséquences que de chuter dans un surplomb (et ce n’est pas mon coéquipier habituel qui me contredira).[/quote]

Je voulais juste mettre en avant le fait que souvent les blessures lors d’une chute sont dues à un mauvais assurage et pas à la configuration de la paroie. Je parle de couennes équipées, pas de trad ou montagne bien sur :slight_smile:

C’est sans doute vrai, il reste que mal assuré il vaut mieux chuter dans un surplomb que sur une dalle couchée. A condition que le mauvais assurage ne consiste pas à lâcher la corde.

Posté en tant qu’invité par DidierC:

Je pense quand-même qu’on s’habitue pas mal au gaz… la première fois au Verdon j’ai eu du mal à me lancer dans le rappel des dalles grises, pourtant pas particulièrement gazeux… et à force d’y retourner régulièrement, ça allait de mieux en mieux. Je me souviens avoir pris un max de plaisir dans « Rêve de fer » (la voisine de « l’ange en décomposition » donc bonjour le gaz) ou dans « Wide is love », pas mal aussi dans le genre…

Inversement, j’ai arrêté de grimper plusieurs années et maintenant je flippe dans des couennes à 15m du sol… Donc je pense que le facteur habitude et "accoutumance"est déterminant…

Posté en tant qu’invité par elbilloutte:

tout à fait d’accord,
après une grosse session montagne de plusieurs jours avec alpi engagé, le grand vide d’une paroi de 35 ou 40 metre en couenne ne me fait pratiquement rien.
Par contre il suffit que je fasse directement un mur en salle de 15 mètres de haut après n’avoir rien fait pendant 2 semaines, ben je flippe

[quote=« DidierC, id: 1467824, post:81, topic:122468 »]Je pense quand-même qu’on s’habitue pas mal au gaz… la première fois au Verdon j’ai eu du mal à me lancer dans le rappel des dalles grises, pourtant pas particulièrement gazeux… et à force d’y retourner régulièrement, ça allait de mieux en mieux. Je me souviens avoir pris un max de plaisir dans « Rêve de fer » (la voisine de « l’ange en décomposition » donc bonjour le gaz) ou dans « Wide is love », pas mal aussi dans le genre…

Inversement, j’ai arrêté de grimper plusieurs années et maintenant je flippe dans des couennes à 15m du sol… Donc je pense que le facteur habitude et "accoutumance"est déterminant…[/quote]

je viens de terminer ce bouquin qui traite justement de la peur du vide et des différentes façons de l’aborder:


C’est pas de la grande littérature, juste une succession d’interviews, mais ça reste assez intéressant.
Globalement la peur du vide apparait innée mais se domestique.

[quote=« rfg, id: 1382412, post:27, topic:122468 »]Je me retrouve aussi dans ces situations, et, c’est con à dire, mais je suis heureux de ne pas être seul!
Dans mon cas, c’est l’élément rocher qui me liquéfie aussi, je grimpe pourtant dans le 7A-B à vue en falaise.
En grande voie, dans ma tête tout tourne à 200 à l’heure, je m’imagine perpétuellement le pire: la corde qui se déchire, le spit qui lâche, ma compagne de grimpe que je vois tomber, qu’on ne trouve JAMAIS les relais de descente et qu’on crève desséché…
Bref, je n’y trouve pas mon compte alors que j’adore cette activité, et en cas d’échec je deviens aigri à frustré en pensant aux hordes de « grimpeurs moyens que je défonce en couenne » qui enchaînerons cette voie, en faisant des blagues et tout et tout…

La solutions pour moi, c’est la même qu’en ski avec le risque d’avalanche et en alpinisme avec les crevasses et les trucs qui font peur:
Chaque année, je m’y met tranquillement, j’attaque par une ou deux voies pas trop dure et je me " ré-acclimate" au gaz.
Dans tout les cas, je ne vais plus dans une voie sans vire ou plein gaz, je sais que j’en serais incapable.

J’ai aussi essayé d’analyser ce pourquoi je me fais dessus:
J’ai remarqué que lorsque je grimpe avec ma meuf ou un proche, en général c’est pour lui que je balise, et ça, ça me scie l’envie de pousser, bien que quoi qu’il arrive, j’aurais la marge de passer (tant qu’il y a des spits au dessus de 6b…).
Lorsque je vais avec une connaissance, je ne peux pas me permettre de faire ma tarlouze, alors je donne tout, et pis, si il lui arrive quelque chose, c’est son problème! Bien sur j’exagère mais je l’ai souvent remarqué dans ma pratique de la grande voie.
Autre truc, la réputation d’une voie, ses cotations… Tout ça, sa va jusqu’à me faire peur devant mon ordi lorsque je fais des projets!..
Du coup, j’ai essayé d’aller en montagne dans des itinéraires vierges, et sans pression, j’ai ouvert quelques itinéraires (à rocher bouchard par exemple ou à la pointe Cézanne) et je me suis acheté un perfo, et lorsque je pars du bas DE DIEU, JME SENS SURFORT!!

Et comme je l’ai dis plus haut, faut rattaquer la saison tranquillement: il y a une semaine, FUCKING BUT à l’Aiguillette du Lauzet, dans vendanges tardive (méga honte) une voie pleine de vires et de pierriers et pourtant, le moral à faiblis.

Et pourquoi ne pas y aller ensemble???

Je suis sur Gre et y aller avec un bon chiard comme moi, y a possibilité de bien rigoler non???[/quote]

Tout simplement génial monsieur l’infirmier… ! J’adore sincèrement.

Moi aussi le vide me fait baliser pourtant je fais des GV depuis toujours.
Mon truc pour ne pas (trop) baliser ? Ne JAMAIS regarder en dessous de soi. Pas facile au début on finit par s’habituer à gérer sa grimpe en respectant scrupuleusement la règle de ne jamais descendre le regard plus bas que ses pieds. Ca ne veut pas dire que j’ai ainsi vaincu toute acrophobie mais le fait d’occulter visuellement le gaz me permet de ne pas paniquer et d’avoir la force de me raisonner quand je sens venir un coup de stress.

Comme au dessus, en cas de vertige/coup de stress, je me fait un tour d’horizon sans jeter un seul coup d’oeil en bas accompagné d’une bonne respiration par le ventre et si vraiment c’est la merde je sors l’arme secrète ! (un p’tit nougat :stuck_out_tongue: ) et ça repart

Posté en tant qu’invité par S & S:

Que cela fait du bien de retrouver « des comme moi »…
Pratiquant l’alpi (avec ma femme, région Cham’ avec tjs le ou les 2 même(s) guide(s), GV et mixte) depuis 5 ans, j’ai mis 2 bonnes années à me laisser pendre sereinement dans le baudrier aux relais et faire confiance totale en mes noeuds, friends, spits, etc… Le guide le plus expérimenté y fût pour beaucoup et sa pédagogie (mélange d’engueulements judicieux mais parfois un peu blessants, de bienveillance omniprésente et de conseils rassurants) m’a sans doute fait gagner bcp de temps et suées froides « inutiles ».
En revanche, je reste toujours pétri d’appréhension (malgré un encordement super court) sur les arêtes neigeuses et/ou en grandes pentes, desquelles je n’arrive pas vraiment à me vacinner !.. C’est con car j’adore ça en statique, ne pense pas être spécialement mauvais cramponneur (sauf sur glace dure…) mais reste parfois terrorisé juste avant de m’y engager ou lors des changements de côté (demi-tour en pleine pente et changement de main au piolet)… Rien que la descente de l’arête de l’aiguille du Midi, en plein été, lorsqu’elle est bien fine et balayée par le vent me glace encore mes nuits d’avant courses, pourtant maintes fois descendue.
Je rêverais de faire des trucs grandioses genre les arêtes de Rochefort où la Bionassay mais la confiance en n’y est pas.
Ma femme n’a pas ce pb et je suis parfois honteux/malheureux/dèçu comme un gosse de ralentir ou faire flipper la cordée…
Pourtant chaque été j’y retourne et l’envie reste intacte. Cela parait bien tordu pour les non-alpinistes/amis à qui j’en cause.
Ils me disent que je suis un contemplatif pur… que c’est le prix à payer pour « y être »… hum hum…
Bonnes vacances à tous.

Steph.

Posté en tant qu’invité par S & S:

Ah… j’avais oublié dans la série des beaux trucs « un peu » gazeux ou bin pentus sous la mirette,
la traversée Midi-Plan ou… la fin de voie en selle neigeuse de l’éperon FRENDO… que je ne pourrais
sans doute jamais taquiner autrement qu’en 2D…
Zavé eu très peur, la’dans (ou dans Rochefort/KUFF/Bionassay), vouz’ossi ?

Si je comprends bien, je suis pas le seul à me liquéfier rien qu’à la vue de ce genre d’exploit :

Ceci dit ça fait du bien de savoir qu’on est nombreux à se savoir pétrifié dans des situations délicates.
Et en même temps, une vraie question ici :

[quote=« La Baltringue, id: 1386206, post:50, topic:122468 »]pourquoi faites vous de l’escalade si vous avez peur du vide ? (je ne trolle pas, ca m’interesse vraiment)
(moi j’aime pas l’eau, je flippe, ben… aucune envie de faire de la plongée)[/quote]

Je veux pas faire mon Bogdanov du dimanche mais bon, on recherche un dépassement de soi dans toutes les disciplines. L’escalade étant classée dans les sports extrêmes, ben on va parfois chercher des sadismes extrêmes, celui-là en fait parti.

[quote=« pierrequiroule, id: 1467908, post:83, topic:122468 »]je viens de terminer ce bouquin qui traite justement de la peur du vide et des différentes façons de l’aborder:


C’est pas de la grande littérature, juste une succession d’interviews, mais ça reste assez intéressant.
Globalement la peur du vide apparait innée mais se domestique.[/quote]

Je vais lire ça avec grande curiosité. Je suis pas sûr du facteur inné, au contraire je crois que le passage de la prudence (acquise) à la peur irrationnelle provient d’un vecteur déclenchant. A un moment, la prudence a éclaté, elle s’est émoussée, on s’est fait peur, mais on l’a pas forcément identifiée comme telle. La peur du vol c’est une projection qui souvent nous ramène à une perception antérieure où l’on a simplement flippé de manière définitive. La grimpe nous renvoie ce sentiment comme une matière miroir. Moi je me souviens très bien du jour où j’ai compris que je pouvais mourir en tombant, j’étais gosse et ça s’est réveillé des années plus tard bien après avoir commencé la grimpe (mode vétéran ON).

la question fatidique est : est-ce que ça se soigne ??

victime d’un accident pour certains anondin (un simple dévissage aux grands montets mais un genou en vrac et la vue de ma mort à la vision du caillou que ma tête se serait fait un plaisir d’aller frapper si le destin en avait décidé autrement) je me suis transformée de chamois des montagnes à « couineuse professionnelle au moindre pas engagé » - et ça fait bientôt 15 ans que ça dure…
à la question « pourquoi dans ce cas on fait de l’escalade alors qu’on est désespéré pendu dans un baudard et que lâcher les mains pour dégainer dans un pas malaisé relève de la torture psychologique » la réponse pourrait être « ne cherche-t-on pas à vaincre le mal par le mal ? » ou alors « non je n’en resterai pas au stade de la randonneuse contemplative et j’ai aussi droit à l’accès à la montagne un peu plus relevée » ou encore « si j’ai pu le faire pourquoi est-ce que je ne peux plus le faire maintenant ??? »

donc non la peur du vide n’est pas forcément innée…
mais dans ce cas comment en venir à bout (parce que ça a quand même tendance à sérieusement gâcher quelques sortoes voire même saisons complètes…)

le bouquin cité ci dessous a l’air intéressant, sans doute une bonne lecture !!

« Le sujet apprend sous l’effet de contraintes extérieures qui nécessitent son propre ajustement permanent. Le sujet construit sa connaissance au fil d’interactions avec les phénomènes grâce à ses facultés d’adaptation : petit à petit il produit de l’autorégulation vis à vis de l’environnement. » (Jean Piaget, constructiviste et figure majeure de l’étude du développement humain).
Ceci décrit assez bien ce qu’il se passe quand on va de la 1ère grimpe en moulinette jusqu’à celle plus experte en-tête (répétition des séances et aussi apprentissage des vols). Peut-être que ce processus valant aussi bien dans la vie que sur un mur est mal utilisé ou mal réexploité quand on est sujet à l’acrophobie, notamment après une vraie chute traumatisante. Peut-être qu’il faudrait reprendre plusieurs fois la voie qui fut traumatisante, ou une similaire, et recommencer le ba-ba des premiers vols : se laisser tomber volontairement. Démystifier l’évènement en lui passant plusieurs couches de je-sais-pas-quoi, comme un hématome qu’il faut résorber.

[quote=« foffer74, id: 1680877, post:90, topic:122468 »]l
« non je n’en resterai pas au stade de la randonneuse contemplative et j’ai aussi droit à l’accès à la montagne un peu plus relevée »[/quote]

et c’est mal de faire la randonnée contemplative ? pourquoi cherche tu de la montagne un peu plus relevée ? Pour ton ego ? pour suivre les copains ? Ou parce qu’avant ca te plaisait ?

personnellement, il y a des trucs que je faisais avant et que je ne fais plus maintenant. Trop peur. Des descentes en VTT, conduire vite sur les petites routes de montagne, etc…
Mais ca ne me manque pas, je considère que ca fait partie de mon changement d’etre humain. L’age, les responsabilités familiales, tout ça nous change. Et donc change nos envies, nos peurs ?

Posté en tant qu’invité par Autes:

Je découvre à l’instant ce fil de discussion et notamment le post de Rozenn, qui date quand même de 2012. Ladite Rozenn a l’air de présenter des symptômes analogues aux miens:

« s’il y a de l’eau ou de la neige au pied de la voie, ça va. S’il y a vue plongeante sur un sol terreux, rocheux, herbeux ou forestier, ça va plus du tout. Petit à petit, j’ai adapté mes activités à l’environnement : de la haute-montagne essentiellement avec une préférence pour la glace et les goulottes, quelques itinéraires quand même rocheux mais avec approche, (donc un cadre visuel) glaciaire. Quasiment plus de grandes-voies ».

Pour ma part, j’ai une aversion profonde pour la GV et la salle: dès que ça devient un peu raide, c’est panique à bord, avec mains qui dégoulinent et jambes tremblantes 50 cm au-dessus de la dégaine… Je me souviens qu’il y a longtemps aux Carroz, à environ 50 m du sol, j’étais tellement paniqué que je m’étais désencordé à un relais (le leader était au relais suivant) pour faire un huit « plus solide ». Sans longe, sans aucune assurance, et surtout sans rien dire à mon leader, à un endroit où j’avais juste la place pour les pieds… Bref, du grand n’importe quoi lié à la peur.
Pourtant, j’ai un assez bon niveau d’alpinisme (D) et je n’ai absolument pas peur de me lancer dans du 4-5 en grosses à 4000 m, sur mes propres coinceurs. Enfin si, j’ai un petit peu peur, mais c’est une peur saine, juste la conscience du danger, que j’apprivoise assez facilement. Finalement, je suis presque à l’opposé de S & S (mai 2014): je me sens très à l’aise sur des arêtes comme Midi-Plan ou la Küffner, que j’aurais presque parcourues sans corde (je dis bien « presque », je suis pas complètement con non plus).

Voilà, et donc, jusqu’à ma rencontre électronique avec Rozenn, je n’avais jamais rencontré quelqu’un ayant les mêmes symptômes. Or, même s’il y a plus grave dans la vie, c’est un problème qui est gênant quand on fait par exemple des stages UCPA, CAF, etc. Parce que ces stages commencent pratiquement toujours par une journée d’escalade en GV. Et comme moi je m’inscris dans des stages d’alpinisme pour niveau AD/D, je me retrouve avec des gens qui sont plutôt pas mauvais en couenne et qui n’ont pas peur du gaz, ou très peu. Du coup, 1) au mieux je passe pour un gland la première journée (pas grave, je me rattrape après), 2) au pire, ça m’est arrivé une fois, je me fais rétrograder dans un stage de niveau inférieur, ce qui gâche un peu mes vacances, 3) dans tous les cas, c’est une journée de terreur pour moi. D’ailleurs, je ne fais pratiquement plus de ces stages :rolleyes:

Je m’explique tout ça par le fait que je suis venu à l’alpinisme à travers les récits d’Herzog, de Whymper, de Mummery, ou même d’Audoubert pour ceux qui le connaissent… J’ai besoin que le sommet suscite en moi une émotion, et cette émotion elle est liée aux livres que j’ai lus dans ma jeunesse, livres où il est question d’altitude, de neige, de glace, etc. Peut-être que si j’avais lu les bouquins des Dolomitards, je serais une bête en escalade? En tout cas, tous ces éléments (altitude, neige, glace…) me surmotivent et me font oublier ma peur.
Autre explication possible: quand on est en haute montagne, la distance jusqu’au dernier point d’impact (si les ancrages lâchent je veux dire) est souvent très grande, il n’est pas rare qu’on ait 500 à 1000 m sous les pieds. Il me semble que le cerveau n’arrive pas à gérer cette dimension, alors que dans une salle ou en GV, les choses gardent leur proportionnalité: on distingue très bien les autres grimpeurs en bas, ou les voitures sur la route, et du coup le cerveau se représente très bien ce que signifierait une chute jusqu’en bas.
Troisième et dernière explication: comme le dit Livanos dans « Au-delà de la verticale », par rapport aux dévers des Dolomites, les grandes faces des Alpes occidentales sont au plus des pentes gentiment inclinées (je rappelle que Livanos était de Marseille). Or moi je ne fais même pas les grandes faces, juste quelques courses en D. Je ne grimpe pas des faces qui me repoussent vers le vide comme la Cima di Ovest. Je suis souvent sur des arêtes, avec certes des passages en 4 ou 5, mais ces passages sont suivis de portions plus faciles.

Pour finir, quelles solutions? Ben comme dit La Baltringue, on peut toujours choisir de ne pas y aller. Il faut juste apprendre à s’accepter, je ne crois pas que grimper du 8c dans les gorges du Verdon rende meilleur ou plus heureux. Moi en tout cas j’ai tiré un trait sur la salle depuis longtemps.
Si malgré tout on a des choses à se prouver et qu’on veut faire de la GV, je vois plusieurs solutions:

  • choisir un terrain incliné, coupé par des vires confortables et réconfortantes, comme dit Rozenn (tu es mon idole :wink: )
  • partir avec un groupe sympa évidemment, des gens qui par exemple vont te chambrer un peu dans les passages difficiles, ça décontracte.
  • être le leader de la cordée a tendance à me donner des ailes: je me sens responsable de mon second, je me concentre à fond sur ce que je fais, et du coup j’ai aussi une grande satisfaction à la sortie de la voie. Alors que je me serais fait peur en grimpant les mêmes longueurs en second, parce que j’aurais manqué de concentration et que j’aurais grimpé comme un cochon (d’autres l’ont dit avant moi sur ce fil).

Voilà pour ma contribution, désolé, c’était un peu long (en même temps, je vous ai pas obligé à lire;-)
Bonne montagne à tous

Ladite Rozenn a des nouvelles pleines d’espoir à partager : elle est allée sereinement à Presles il y a 15 jours ! Coïncidence avec la remontée de ce post…

Presles ce n’est pas seulement un symbole de grande voie et de gaz, c’est, dans mon histoire personnelle, un mythe traumatique, donc d’autant plus bloquant. Il y a une dizaine d’année, j’avais été prise d’une bouffée d’angoisse au pied de la voie et l’évidence c’était imposée « je ne grimperai jamais à Presles ». Demi tour, direction la voiture. Même confortablement allongée dans mon canapé, la simple évocation de cette idée continuait de provoquer chez moi une angoisse terrible.

Comme je le racontais il y a deux ans, ça a commencé à aller mieux lorsque j’ai accepté que c’était comme ça et que je n’allais pas me faire violence, on est là pour se faire plaisir non? J’ai continué à arpenter la montagne dans des configurations plaisantes (même si, objectivement, totalement irrationnelles - se trouver détendue en glace sur un relais sur broche plein gaz mais par sur des spits en béton… - mais peu importe). Et puis, faire en même temps un chemin intérieur, évoquer d’autres choses, d’autres formes de vide, de vertige, d’abandon, comprendre que la montagne cristallise des choses qui n’ont pas directement à voir avec elle. Petit à petit j’ai l’impression d’avoir réapprivoisé le vide. Voyant que ça avançait, je me suis dit que je ne perdrais rien à tenter autre chose…

Cette autre chose c’est l’hypnose hericksonienne - j’étais totalement ignorante de cette technique - on m’aurait dit d’aller voir un marabout qui planterait des aiguilles dans une poupée ça aurait été pareil. J’ai fait deux séances. Et… des choses se sont débloquées. Je pense que ce n’est pas indépendant du chemin accompli avant, mais il est certain qu’il y a eu un net changement après ces séances.
Ma peur du vide était alimentée par des auto-suggestions mentales très négatives (à force de se dire qu’on va avoir peur, on finit par avoir peur) et dès le lendemain je me suis surprise à entendre un autre chant, encourageant et postif celui là. J’ai continué mon chemin sans chercher particulièrement à me confronter à ce qui me faisait peur, mais en m’apercevant (ou d’autre le notant pour moi) que petit à petit je faisais des choses que je ne faisais pas avant.
Quelques mois après j’ai commencé à faire des vols en salle d’escalade (le truc, évidemment, inconcevable auparavant). A faire confiance à un assureur inconnu. Des petites choses, que je juge comme telles aujourd’hui mais qui étaient des… montagnes auparavant. Et puis il y a 15 jours, il avait plu toute la semaine, difficile d’aller grimper sur du rocher incliné plein de vires arborées sans se retrouver dans des flaques d’eau. Direction Presles, avec un partenaire de confiance et bienveillant qui sait le chemin parcouru. La configuration était parfaite : un temps magnifique, deux cordées derrière pour briser un éventuel sentiment de solitude, un niveau suffisant pour que je sois concentrée sur ce que je fais, mais pas trop pour éviter d’être taquet et paniquer. Ca a déroulé. Calmement. Joyeusement. Je ne me risquais au début qu’à des regards vers le haut ou le côté. Et puis, au milieu de la voie, j’ai jeté un coup d’oeil en bas. Et je me suis juste dit que c’était beau. Et…? Et c’est tout. C’était beau.

Presles n’a nullement était une émotion très forte de victoire car il y a victoire quand il y a baston. Là, je n’ai pas eu à lutter. Un bonheur serein. Une émotion nouvelle. Pas désagréable.

Courage ! :slight_smile: