Nos petites histoires autour de l'escalade

Posté en tant qu’invité par Pierre Rouzo:

Bonjour à tous,

je trouve assez sympathique le fait de faire partager ses moments d’émotions
en escalade (plombs / à vue / solos / équipement).
Le problème, c’est en fait le principe même du forum : le sujet peut très vite
être dévoyé par des tonnes de petites remarques et microscopiques réponses
dans des tac-au-tac qui, finalement, saoulent un peu tout le monde
et en découragent plus d’un (!).
Le principe des chroniques de Jean Pierre Banville sur
http://escalade-alsace.ifrance.com/escalade-alsace/, est impeccable :
une histoire, point. Pas d’interventions parasites.

C’est pour cela que je me propose d’ouvrir ce nouveau sujet sur
«nos petites histoires autour de l’escalade» et de faire des copiés-collés de celles
qui ont été déjà racontées. Un exemple : il semble bien qu’un certain Nico ait envie
de nous en écrire quelques unes… mais il s’est trompé de lieu :
il est dans le bistrot d’à côté (!)…

MERCI, donc, d’essayer de ne pas trop nous pourrir ce «forum» qui n’en est pas un…

On essaye ?

Allez !

@bientôt

Pierre

Pour une meilleure lisibilité, merci de respecter les qq consignes suivantes:

- Si l’on veut faire des commentaires, on les fait… sur ce sujet: [Nos petites histoires…] Commentaires

  • les auteurs des petites histoires peuvent ajouter à la fin de leur prose le lien renvoyant sur la page des commentaires: [url=http://escalade.camptocamp.com/forums/read.php?f=15&i=50329&t=50329] [Nos petites histoires…] Commentaires[/url] (il suffit d’enlever les 2 petites étoiles (**) pour rendre le lien actif ;-))

  • pour améliorer le rendu visuel, il est possible d’ajouter un peu de formatage HTML, le fonctionnement des balises est expliqué dans la FAQ

Posté en tant qu’invité par le curieux:

Auteur: le curieux (—.w193-253.abo.wanadoo.fr)
Date: 27 oct 2004 14:53

Accepteriez vous de raconter l’assention de votre plus belle couenne. Quand je dis plus belle, ce peut etre la plus belle par la grimpe qu’elle impose. Ce peut etre aussi la voie la plus dure réalisée à vue ou après travail, la dernière voie que vous venez d’équiper ou de grimper… ou l’assention réalisée un jours particulier pour vous. Merci de me faire (et de nous faire) partager ce moment particulier. N’ayez pas peur d’expliquer les pas, la structure de la voie et du rocher, le mousquetonnage limite qu’il faut effectuer au 6eme point avec les deux pieds en adhérance… et l’ambiance qu’il pouvait y avoir.
Lorsque je lis des histoires de grimpe, je grimpe un peu dans ma tête alors merci à vous.

Posté en tant qu’invité par Nuken:

Auteur: Nukem (—.osdbas.external.hp.com)
Date: 28 oct 2004 14:11

Ma plus belle couenne, L’Antoinette à la Martinswand.

Déjà le départ m’a demandé un certain effort. Le premier point est un peu haut à mon goût et il faut bien viser en cas de retour au sol. Entre les rochers, la pente et l’assureur, les options pour un atterissage en douceur sont assez rares. Même si le départ est techniquement pas dur, je cogite un peu quand même.

Bref, aprés ce départ dans la joie et la bonne humeur (surtout une fois le premier point clippé) je suis une jolie fissure qui part sur la gauche de la voie alors que les bonnes prises se concentrent sur la droite de la voie …

Une fois cette erreur de tir corrigée, arrivée sur un petit surplomb. Le dernier point un peu plus bas et le prochain … Ben, j’en sait rien mais pas en vue en tout cas. Les prises sont bonnes, mais pour les pieds, ça tient plus de l’adhérence que des marches d’escalier.

Ok, il fait beau, le repos est plutôt bon, mais il va falloir prendre une décision. Prendre un but ou espérer que le prochain point est en fait tout proche. Il l’est.

Quelques colonnettes plus tard histoire de varier encore plus l’escalade, je me sens léger, trop léger. Il me reste une dégaine au baudard et je ne sait toujours pas où est le relai ni à quoi il ressemble. Et évidement, vu le relief de la voie à cet endroit, je vois pas ce qui m’attend derriére. Y’a un principe en équitation quand tu fait du saut d’obstacle: Quand tu le sent pas, avance. Je me dis que si ça marche en équitation, ça peut marcher en escalade. Et effectivement, derriére m’attendait le dernier point de la voie avant le relai.

Il fait beau, il fait chaud, je viens de faire une belle voie à l’escalade variée. Il reste juste un petit détail à régler, Est ce que mon assureur à vue passer le milieu de la corde ou pas ? L’idée est que je me fasse mouliner en bas pour qu’il essaie la voie en moul si il ne se sent pas de la faire en tête. Sauf que je le voit pas et que je en l’entend pas beaucoup plus. Aprés quelques tentatives de communication assez peu fructeuses, je décide que c’est bon, je vais de toutes façons pas m’installer ici. C’était bon.

On avait prévu de faire L’Allemande aprés, mais vu notre état de fraicheur en fin de journée aprés L’Antoinette, on s’est dit que c’était pas raisonnable …
ça sera donc pour une prochaine fois.

Posté en tant qu’invité par J2LH:

Auteur: J2LH (—.net195-132-24.noos.fr)
Date: 28 oct 2004 12:43

le curieux a écrit:

Accepteriez vous de raconter l’assention de votre plus belle
couenne.

C’est marrant, il me semble qu’aucune couenne ne m’a laissé de souvenir vraiment marquant. En réalité la voie qui m’a le plus marqué était une voie en SAE.

Bon, vous voulez que je vous la raconte ?

(approbation de l’auditoire)

Elle était verte et c’était la dernière 6b qu’il me restait à enchainer sur le mur (avouez que ça commence bien). Ca commençait par une diagonale bien physique qui partait vers la gauche avec de grosses prises pour les mains sur lesquelles il fallait faire des croisements de mains, le pied droit pouvant parfois pousser sur ces prises, le pied gauche en adhérence puis une petite écaille permettait de mousquetonner la première dégaine le pied gauche posé sur un petit gratton. Ensuite premier réta sur un volume puis une traversée sur la droite pour arriver sous un autre volume, le crux de la voie. Là il fallait poser deux doigts de la main droite dans un petit replat à droite du volume, le pied droit très haut sur une prise éloignée, on poussait sur le tout pour atteindre de la main gauche une réglette pas très profonde au dessus du volume, de là on pouvait monter sur le volume où le pied de l’homme n’avait jamais mis la main (si vous avez bien suivi…). Je me souviens moins bien de la fin qui était moins délicate mais difficile avec le palpitant à 200. (Ca vous a plu ?)

C’est sûrement la voie que j’ai la plus travaillée et celle que j’ai eu le plus de plaisir à enchainer. J’ai bien un ou deux projets en falaise (Newton fait sa loi une 6b à la Grande Jeanne) mais comme au cours d’une séance je fais rarement deux fois la même voie et que je change régulièrement de site force est d’admettre que c’est en SAE que j’ai eu la satisfaction la plus grande.

Posté en tant qu’invité par J2LH:

Pierre Rouzo a écrit:

Par contre, je ne vois pas d’équivalent sur C2C (?)…

Tu peux raconter une aventure sur un site particulier dans le guide des falaises, ça peut d’ailleurs servir à d’autres (ex: http://escalade.camptocamp.com/secteur953.html?ida=320&sida=320). Tu peux ensuite mettre l’URL ici et ça évitera que ton histoire soit polluée.

MERCI, donc, à des gens comme J2LH et à ses contradicteurs,
d’essayer
de ne pas trop nous pourrir ce «forum» qui n’en est pas un…

Comment ça on n’est pas sur un forum ?

Posté en tant qu’invité par tom:

Auteur: tom (—.grpleg.net)
Date: 28 oct 2004 13:07

perso c’est « nuage noir » 6a.
sur du calcaire jaune abrasif
d’abord '6 mètres de pur dalle puis une vire pour te préparer à la suite .
15 mètres de dever ( 4 mètres d’avancer en haut) avec une fissure tout du long , ou tu peux plus ou moins mettre les doigts. de temps en temps tes doigts passent a d’autre moment non .
la première partie de la fissure c’est de face
puis légèrement un dufler.

C’est le genre de voie qui chauffe les bras. Pur , rien à dire.

Voie majeur de lerouville (55)
Pour voir 2 ou 3 photos
http://membres.lycos.fr/comiteantidalle/galerielerouville1.html

bonne grimpe

Posté en tant qu’invité par baghirati:

Auteur: baghirati (—.w80-12.abo.wanadoo.fr)
Date: 28 oct 2004 13:09

un joli 6b à omblèze :« les jambes en l’air » , pas la plus belle ni la plus difficile , mais un bon souvenir car j’avais pris un gros vol à la sortie du dévers avec retour sur la tête de mon assureur qui papotait , avant de la sortir …
un mur facile sur 5-6 mètres puis un léger dévers à trous avec la spécialité locale : plus moyen de voir ou il faut mettre les pieds dans les strates , et difficile de choisir la bonne prise pour les mains parmi tous ces trous , il y a un beau bac loin a droite mais on ne le voit qu’une fois dépassé , ensuite un bel enchainement de mouvements élégants et variés en dalle pendant encore 20m sur des prises généralement franches mais lointaines avec un dernier pas bien lisse au dessous du relai .
(description sous toutes réserves c’était il y a longtemps, l’auteur ne saurait être tenu pour responsable etc.)

c’est pas facile de « raconter » une couenne , si ma mémoire n’était pas défaillante (l’alcool sans doute) j’essaierai bien le récit d’une tentative dans chimpanzodrome , c’était il y a presque 20 ans mais je revois encore certains mouvements …

Posté en tant qu’invité par Pierre Rouzo:

Auteur: Pierre Rouzo (—.fbx.proxad.net)
Date: 29 oct 2004 01:37

A une époque (attention : c’est loin), Serge Jaulin m’avait demandé
de rédiger un texte sur un sujet similaire. C’était pour une nouvelle rubrique
de Vertical : “Chef d’œuvre” ça s’appelait (!).
Las, le premier intervenant, c’était Jean Pierre Bouvier et il décrivait l’ascension
réussie de l’un de ses “chef d’œuvre” à lui… une voie complètement POURRIE DE SIKA
(visible sur les photos) !!
J’ai donc rédigé mes petits souvenirs à moi, mais deux ans après l’événement…
heu… en 1992 …(je sais : c’était au siècle dernier) (!).

Hélas pour moi, je sujet a été refusé.
Vous verrez, c’est sans aucun doute à cause de la fin…
A l’époque, “la mouche” (JPB) avait quelque amitié avec un très très célèbre
membre de la rédaction…

Attention, c’est un peu long. Si ça vous gonfle, n’hésitez pas à lire d’autres
forums comme le sympathique “Pat Edlinger est un gros P.D.”
ou le passionnant “Mes chaussons puent”…


C’est un dimanche matin, il est à peine 9h00 et le téléphone sonne.
Celui qui me réveille s’appelle serge Jaulin. Ce monsieur travaille
régulièrement pour vertical et me fait l’honneur, à moi, Pierre Rouzo,
de me demander de bien vouloir illustrer une nouvelle rubrique du magazine :
« Chef d’œuvre » ça s’appelle.

Flatté, extrêmement étonné, puisque cela fait maintenant une bonne décennie
que Jaulin/Rouzo ne peuvent guère se sentir (pour des raisons très moyennement
élucidées bien sûr), je bredouille donc -sur le moment- une réponse évasive…

Mais bon, la conversation est courtoise, et comme je ne suis pas insensible
à l’idée de voir ma tronche un jour imprimée dans un beau magazine,
j’en accepte le principe…

Le jeu consiste à parler d’escalade (ça n’est pas une surprise), de
l’équipement d’une voie et surtout (ce que je ne trouve pas totalement
idiot), de la réalisation d’une voie que l’on a soi-même équipée… et tant
qu’à faire -vu le nom de la rubrique - peut-être pas de la plus laide.

“Pas forcément la plus dure", me rassurait, tout de suite, ce chroniqueur
de Jaulin lorsque je lui expliquais qu’en ce moment, j’étais plutôt « 7b taquet »
car j’équipais systématiquement tous les week-ends…

Mais bon, tous mes copains vous le diront : ma voie à moi,
et mon plus beau souvenir, c’est « Biotop ».
C’est dur, c’est beau, et s’il vous plaît de m’en entendre
parler, allons-y pour Claret, mais deux ans en arrière.


Avec Hugues, le rasta Beauzile, nous avons dû passer trois jours entiers
à batailler pour équiper ce toit magnifique…
Une ligne grandiose que l’on s’était réservée pour la fin.
Pour la fine bouche.
Car cela faisait maintenant 6 mois, que lui et moi étions dans les
toits alentours. Avec chacun son petit chantier à nettoyer, à équiper / chacun
sa nouvelle voie à essayer / chacun son petit nom “perso” à inscrire d’une belle
écriture une fois que les broches étaient enfin scellées.

Que des voies superbes, dictées par le caillou comme le sont « Faux plafond »
(à moi), « Makossa » (à lui), « Abri-bus » (à moi) ou « Anti-G » (à lui).
Des voies que l’on se disputait presque et qui, j’espère, inscrivent encore
de beaux souvenirs chez tous ceux qui s’y attaquent…

Mais là, cette ligne, cette grande diagonale bien visible du bas
qui file juste au dessus des stalactites…
tous les deux -bien sûr- en rêvions comme des fous.
Celle là, nous savions -déjà- que nous l’équiperions ensemble !

Aux vues des chantiers alentours, nos petits camarades s’étonnaient
qu’elle ne fût pas encore équipée…
Pardi : s’attaquer “à çà”, représentait forcément un boulot énorme.
LE chantier de Claret.

Et lorsqu’au premier jour, sous mon marteau, le gros baquet inversé
de la sortie du toit a fini explosé en bas…
Hugues m’a regardé d’un sale œil.
Il était allongé loin devant, suspendu à un crochet minable, en train de tisser
une véritable toile de cordes fixes pour la mise en chantier.
« Tapes-pas si fort, tu vas tout démonter ! ».

Damned. Avec cette prise en moins, c’était même plus du 8c, c’était pire !
Après « Guère d’usure » et « Elzévir, » allions nous, une nouvelle fois, ouvrir
une voie bien trop dure pour nos capacités ?

… … …

En essayant du bas et les dégaines au cul, ça nous a vite semblé costaud.
Voire même rédhibitoire pour une partie du toit : trois bons mètres,
qui vraiment ne voulaient pas nous laisser faire.

Le mur du bas cotait déjà 7c, un repos magique venant juste après.
Et là, derrière la nuque, ces douze mètres d’avancée…
Une sensation horrible !

En tout, une cinquantaine de mouvements, dont une trentaine de bien durs,
et trois ou quatre que l’on n’arrivait même pas imaginer !

Diable !

Tout le reste « faisait » proprement, et déjà l’enchaînement paraissait
diabolique. Alors, avec ce crux -en plus- qui nous résistait méchamment…
ça commençait à nous laisser rêveurs (et surtout, à faire ricaner
autour de nous sur nos folies de grandeur)…

Pendu au bout de la corde, et après trois ou quatre tentatives de mise en
pratique de théories farfelues sur des jetés à l’horizontale, j’observait
-avec dépit- mon impuissance à trouver une quelconque solution.
Complètement dégoûté de la vie, en en voulant au monde entier
(j’ai mauvais caractère), j’allais abandonner lorsque le jeune Beauzile
se mit à s’énerver. « Il faut coincer », me dit-il.
Il est bon lui, et je coince quoi moi ?

Et voilà le rasta en pétard, qui se lance à l’assaut de cet espèce
de crux en forme de dos crawlé aléatoire…

Après 20mn d’efforts, rusé comme le renard et têtu comme la mule,
celui-ci réussit -effectivement- à coincer « quelque chose » pendant quelques
secondes : son 44 de pointure gauche… et puis plus rien.
« A toi de faire le reste » me murmura-t-il comme ça, assis dans la poussière,
encore sanguin jusqu’aux oreilles.

Bon d’accord : à mon tour.
Mais je suis sûr que cette sorte de “fissure” évasée ne va jamais vouloir
de mon 41 de pompes de ville, moins les trois que je m’impose
pour l’escalade…

Jamais !
Et puis surtout, rien n’est vraiment résolu : il reste deux mouvements
affreux pour y rentrer, et deux jetés sordides pour en sortir…
de sa jolie trouvaille!

Bon, allez, j’y vais.
C’est bien simple, mon pied ne tient qu’une fois sur dix !..
Et encore, ça n’est que le lacet qui sert vraiment à l’adhérence.
Bien, pas de problème me dis-je : je fais comme les pros :
je change de pompes.
Je garde, pied droit, ma vieille pantoufle fétiche, et pied gauche, j’enfile
une sorte de super babouche fluo, qui offre l’avantage d’avoir été
bizarrement conçue, au point quelle porte -sur le dessus- un gros « platra »
de gomme.
Exactement ce qu’il me faut…
Ainsi chaussé « bigare », je repars à l’attaque sous les quolibets des
demi-pointures restées au sol.
Mais ce que ne savent pas ces moqueurs du dimanche, c’est que je suis
un vrai teigneux, et que cette voie je l’ai tellement rêvée, que je vais leur
montrer, moi, comment ça passe.

Ce film, c’est pas « Trop belle pour toi » c’est …« Putain, con, ça va chier ! »

Et ça marche. J’arrive dans le pas complètement asphyxié par un mouvement
terrible dans une apnée totale (je suis franchement desservi, il faut bien
l’avouer, par l’abus quotidien de la gauloise sans filtre !), met le pied
au bon endroit (on se croirait dans une dalle, tellement le caillou est près du pif !)…
et ça tient.

Enfin, une fois sur huit. Il y a donc du progrès.

Quand ça a tenu, j’ai même réussi les jetés. Le premier n’est pas vraiment
extrême mais le deuxième est total : on arrive sur un plat et le baquet est
derrière. Il faut alors re-jeter d’un petit bond d’à peine 3 cm.

Superbe.

C’est tout con la varappe : il n’y a qu’a empiler les nouvelles découvertes
avec le reste et le tour est joué. Fastoche.
Y’a plus qu’à.

Hélas, au bout de 10 essais, ça ne marche toujours pas : à chaque fois que
j’arrive très motivé du bas, ce satané pied gauche refuse de coopérer.
Par contre, après la chute, dès que je réessaye d’où je suis, ça marche.

C’est chiant : ça devient pénible ce problème d’adhérence dans ce toit
pour gros bras !

Heureusement que Lucien, lui qui m’assure à chaque fois, ne se lasse pas
de me voir gambader au plafond sur cette ligne magistrale.
Sinon, la hargne m’aurait quittée.

Le vieux bonhomme, qui s’inquiète maintenant pour ma santé mentale,
me conseille gentiment de travailler le reste… « si des fois ça passait »
(j’adore ce conditionnel!).
Que dalle! j’ai deux dégaines au cul, les autres sont en place jusqu’au
crux, et le reste, le reste… Je sais pertinemment que c’est encore très
dur, mais je l’ai fait une fois, à vue, et si un jour ça passe, faudra venir
m’arracher des prises pour que je tombe avant d’avoir embrassé
cette satanée chaîne d’un relais que j’ai moi-même posé!
Nom de Dieu, ça va chier !

Et ça chie.

Le jour J, je fais carrément de la dyslexie gestuelle, croise au début
du toit sur les inversées bi-doigts… complètement à l’envers !
Et l’erreur m’est signifiée par une douleur cinglante, dans l’avant bras,
que je connais très bien : c’est une élongation.

J’en fais part à Lucien (comme quoi il n’est pas interdit de papoter dans
du 8) et poursuit, sous ses encouragements, mon bonhomme de chemin…
mais hélas complètement démoralisé.

J’arrive au crux, je “coince” le pied, je jette une première fois, une
deuxième, choppe le baquet, tire le mou (pour la toute première fois à cet
endroit précis !), m’apprête à mousquetonner à l’horizontal… et réalise
soudain, que ce fameux pied gauche qui m’a longtemps posé problème,
peut très bien, dès cet instant, décider de ne plus adhérer à ma cause.

Lucide, je me met donc à faire mon Patrick Edlinger, me pends par un seul
bras (le baquet n’a qu’une place), avale le mou et… hélas, moins musculeux
que mon maître vénéré, tourne sur moi-même avec le mou dans la bouche
et me retrouve maintenant avec la dégaine placée derrière les oreilles
(je peux même voir de face, en contre-bas, Bérardini qui s’inquiète) !

Mais je l’ai dit, si ça passe, ça va chier !

Et comme je suis passé, je bricole maintenant comme un dieu,
randonne carrément dans des postures atroces pour la santé des genoux,
fournis -de-ci de-là- des efforts à vous dégoûter des sorties en plein-air,
vais même jusqu’à jeter pour le simple plaisir, et pour enfin atteindre
la chaîne, zippe d’un pied dans un trop plein de bonheur…

Je viens de réussir « Biotop » !
Loin à gauche sur la falaise, les copains me congratulent déjà par des cris
et des gestes. Loin sur la droite, d’autres copains me congratulent encore
et de la même façon…

La vie est douce.

Et tout ce joli monde -bien évidemment- se retrouve peu après attablé,
au bistrot, où j’ai mis au frais le champagne d’occasion !
Car “chez-nous”, il y a une tradition qui ne doit pas se perdre : on paye son
coup, le jour où l’on a réussi les choses auxquelles on a beaucoup tenu…
C’est comme ça. Et c’est bien.

Et ce jour-là, nous étions une trentaine à disputer les chaises aux buveurs
autochtones dans LEUR café des sports !

J’ai adoré ce jour.

Un mois d’abstinence me fut nécessaire pour oublier l’élongation.
Mais je n’ai pas eu beaucoup de mérite car j’étais tranquillement assoupi,
par un bonheur tout bête, le cul bien installé dans un fauteuil tout en feuilles
de lauriers…


Il est très difficile de décrire ce genre d’émotions fortes. Il n’est pas
facile -non plus- d’expliquer ce que l’on éprouve à cogiter une ligne
dès que l’on voit du caillou, de faire partager ses folies, ses doutes et les
peurs que l’on se fait, lorsque, enfin, on se décide à équiper.

Grimper dans « ses » voies pour les toutes premières fois est toujours un régal.
Et si parfois, j’équipe çà comme un con (puisqu’autrefois j’ai même taillé des
prises / honte sur moi !), par précipitation souvent mais par passion toujours,
jamais, je ne ferai ce qui a été fait : bricoler des prises au sikadur, sur le rocher,
alors qu’on a les même à la maison -reproduites à l’identique- pour s’entraîner
à l’enchaînement… dans la nature !

Ca a quelque chose d’assez putride qui va jusqu’à pourrir le joli mot
d’« insoumission ».

A vous qui confondez prises en résine et rochers millénaires, sachez que
dans « Biotop », toutes les prises sont naturelles, et que le seul sika employé
sert à tenir les broches !

Et c’est en toute modestie que j’équiperai, demain, une voie dont la
cotation sera uniquement dictée par la nature et que je nommerai ainsi
pour le simple plaisir: « Tue-mouche ».

Un dernier mot à propos d’équipement. Gloire à ces pseudo-poètes qui se
touchent le pistil en parlant de « chefs-d’œuvre » lorsqu’ils parlent
d’ouverture. Gloire à ceux qui se prennent pour des peintres lorsqu’ils
signent d’un petit nom ronflant le bas des voies qu’ils finissent
d’ouvrager, qu’ils sachent quand même -car ils l’ont oublié- que la seule
œuvre maîtresse est tout simplement la nature. Et que l’intervention de
l’homme n’est que basse besogne.
Nous ne sommes pas beaucoup à équiper des voies et aucun d’entre-nous
ne devrait être payé pour le faire. Mais que les grimpeurs consommateurs
gentiment dorlotés, sachent aussi qu’équiper est un boulot énorme,
éprouvant et dangereux -effectué de manière totalement gratuite et
désintéressée- et que le seul moyen d’équiper ailleurs (toujours et encore ?)
pour le plaisir de tous, passe par la simple vente des topos (qui représentent
-eux-même- un travail important).

Sachez maintenant qu’à Claret nous ne tolérerons plus les photocops du nôtre.
Qu’il ne coûte que le prix d’une mauvaise dégaine et que son achat
n’est pas obligatoire !

Et que s’il ne vous plaît pas, vous pouvez toujour -facilement et sans problèmes-
vous en bricoler un bien à vous… même en pompant le nôtre !
Mais ne photocopiez pas le travail des autres !

Attention : celui que nous proposons n’est plus d’actualité : il manque en effet
une voie que Hugues vient d’équiper et qui s’appelle (sans déconner)
« No photocop ». Une voie que vous pouvez tout de suite inscrire dans la colonne
des gros 6… des très très gros 6 même…

un « chef d’œuvre » de mauvaise foi.


Voilà, désolé : ce texte a plus de dix ans, et s’il a été refusé…
c’est sans doute -aussi- qu’il n’était pas bien terrible.
Mal écrit sans doutes.

Depuis, les jeunes forts on trouvé une superbe variante qui suprime
le problème rencontré au début : elle offre une belle envolée en parfaite
adéquation avec le reste de la voie.
C’est encore plus beau et moins aléatoire.

Depuis (encore), de jeunes martiens l’on faite à vue !

J’aime l’escalade, CETTE escalade :
sur le rocher, dans son état naturel…
et dans la nature.

Au revoir.

Pierre

Posté en tant qu’invité par Tim:

Auteur: Tim (—.fbx.proxad.net)
Date: 30 oct 2004 11:02

Salut à tous, je crois que l’un de mes plus beaux souvenirs en couenne reste mon premier 6c à vue, et encore si on respecte l’éthique ce fut plutôt flash que à vue, à l’époque je ne voyais pas trop bien la différence, mais je crois que ce jour-là j’ai justement compris ce que pouvait apporter une bonne observation de son pote qui en chie en posant les paires (hein stef’ :wink: ).

Bref, c’était l’année dernière, à peu près à cette époque, par un beau matin d’automne donc, à omblèze. La voie s’appelait (et s’appelle toujours d’ailleurs) « sert cher serge », une magnifique ligne de 36 mètres.
La journée n’avait pas commencé terrible. Après quelques longueurs en 5 pour m’échauffer dans lesquelles je ne me sentais déjà pas en super forme, j’avais effectué péniblement « tac », un 6a+ avec un pas un peu physique mais sans plus. Je n’arrivais pas à pauser mes pieds et seule une petite marge physique m’avait permis de m’en sortir, bref je ne donner pas cher de ma journée d’un point de vue perf’ (à mon niveau on s’entend) et je m’apprêtais à enchaîner les longueurs dans le 6a.
Avec ma copine, on a alors rejoint nos petits camarades qui étaient dans le secteur « bicolore ». Après avoir fait encore une ou deux voies en 6a dans le secteur (dont un vraiment classe, les clefs du nirvana" je crois), stef’ (mon partenaire de cordée, en bons grimpeus machos on avait mis nos copines ensemble), se lance dans ce fameux « sert cher serge ».

J’étais vraiment impressionner, d’une part, par ce grand mur jaune où toute la première partie semblait totalement dépourvu de prise (enfin pour mon oeil de grimpeur de 6a/b), et de l’autre par l’entreprise dans laquelle stef’ se lançait. Il faut savoir qu’en bon potos de cordée on se tiraient bien la bourre et qu’à ce moment le bougre avait une sacrée confiance par rapport à votre humble serviteur.
Donc je le vois partir, et à peine deux mètres après le début les difficultés commencent, le stef’ passe péniblement au dessus de la deuxième dégaine, il pousse un peu sur le pied, essaye de monter le deuxième, et hop il tombe !!! Suit un long moment d’escrimmade puis il fini par réussir cette section et n’aimant pas les vols de plus de 1 mètre il n’a plus le choix et dois atteindre la troisième dégaine et réussi à tenir une colo pas terrible et à mousquetonner… repos (sur la dégaine). Puis il repart.
D’en bas j’observe tous ça : bon la première partie bien que dure me semble tout de même enchaînable, surtout en ayant vu les méthodes trouvées par stef’, ce qui me permettra de ne pas traîner dans le passage, d’autant plus que c’est un style que j’apprécie particulièrement, du bien vertical avec de bonne réglette (donc de bons pieds), et qu’après avoir vu stef’ passer les prises me sont miraculeusement apparues. Apparemment ce qui est dur c’est d’aller chopper cette colonnette, après cela semble vraiment plus facile, pour preuve, stef’, pendant que je me livre à ces réflexion, enchaîne assez facilement. Il s’est quand même bien cramé dans le départ et est obligé de reprendre un repos artificiel avant d’attaquer la dernière section qui déverse légèrement au départ. A peine a t’il repris son ascension que je l’entends pester : « pu…, j’suis vraiment trop con, y’avait un repos total juste au dessus, pfff… » !!! eheh, mon esprit retors de grimpeur espion enregistre immédiatement l’information, et je l’observe terminer difficilement la voie tout en méditant sur ma future stratégie : Tout va se jouer dans le début, il faut que je mémorise parfaitement les premiers mouvements pour pouvoir sortir rapidement de cette satanée section du départ, ensuite, en gérant bien mon effort ça semble vraiment jouable… je sens l’excitation qui monte en moi. Cette ligne qui une demi-heure avant m’effrayait passablement m’attire irrésistiblement et je mouline stef’ à toute vitesse. A son arrivée, il avait conclu, de manière fort perspicace que j’étais bien chaud pour me lancer à mon tour dans la voie, puisque je ne lui avais même pas laisser le temps de me demander s’il devait reprendre les paires.

Après m’être encordé je me remémore rapidement les premiers mouvements (je suis désolés mais autant sur le moment j’aurais pu décrire la section pas par pas, autant aujourd’hui j’en suis totalement incapable, je me rappelle juste que c’était bien vertical, avec de bonne réglettes crochetantes et fournissant ensuite de bons pieds à utiliser plutôt en carre externe), puis je respire un bon coup, et je me lance.
Ca y est c’est partie, dès le début je sais que ça va faire, autant le début de la journée a été laborieux, autant maintenant je me sens parfaitement en osmose avec le rocher (je sais, ça fait un peu péteux de dire ça comme ça, mais c’est vraiment ce que j’ai ressentit), chaque mouvement me paraît plus naturel que le précèdent, et même si je dois un peu forcer dans la première section ce sont bel et bien mes pieds qui me propulsent vers les prises suivantes et non mes petits bras qui tirent vainement… j’évite ainsi l’asphyxie et grâce à l’observation préalable que j’ai pu faire de stef’ je me sors rapidement de la section dure. Je souffle un coup, profitant de la bonne préention que m’offre la colo malgré son air si peu hospitalier du bas. Puis je repars, j’atteins le repos total encore une fois assez rapidement, c’est vraiment incroyable cette aisance, c’est sans doute une des première fois où j’éprouve cette sensation de fluidité, et surtout de contrôle, et d’une certaine façon de domination de la difficulté.
Je me lance dans la troisième section, encore un pas encore un peu dur (physique pour le coup), puis je termine ce pur moment de bonheur en me servant au maximum des marches providentielles qui apparaissent à la fin de la voie. En effet, après 36 mètres mes bras m’abandonnent de plus en plus. Encore un petit effort et enfin j’y suis !!! Je cris de plaisir, bien qu’à chaque fois que je suis en bas, cette pratique me paraît totalement puérile et pure frime, là pour le coup je m’en fout complètement, de toute façon à cette hauteur et avec le vent qui souffle personne n’a dut entendre… Wahouuu, quel bonheur !!!

Voilà, à ma redescente je suis comme sur un nuage, serein, enfin dans une dimension autre, il faut le dire, bien que cela sot difficilement descriptible, mais j’imagine que beaucoup d’entre vous on déjà connu ça, en tout cas je vous le souhaite.
Fort de cette réussite, la journée s’est terminée dans la même ambiance et surtout par un coup à boire à la terrasse-jardin de ce cher moulin à pipe et, bien sûr, car la tradition c’est la tradition, à mes frais…

Posté en tant qu’invité par Pierre Rouzo:

Auteur: Pierre Rouzo (—.fbx.proxad.net)
Date: 04 nov 2004 17:59

Bon, si Mr Lecurieux commençait -lui même- par raconter ses meilleurs souvenirs
d’escalade, ça inciterait peut être les autres à en faire autant…
Non (?)…

Bon, moi, j’en ai une autre
(pareil : ça date un peu) : “Le Plomb du Jour !”.

C’est l’été et Jean-Yves et moi sommes à Omblèze depuis quelques jours.
Il fait chaud, mais les gorges sont superbes et la température y est très agréable.
La journée, on y fait des voies splendides, le soir on mange et on se bourre la gueule
(invariablement, mais toujours par accident) au Moulin de la Pipe…
pour enfin finir vautrés -à deux pas du cimetière- à compter les étoiles filantes
qui passent (souvent en double) au dessus de nos têtes…

C’est génial les vacances.

Jean-Yves est un bon ami à moi.
Nous avons pratiquement commencé ensemble et vite sympathisé.
J’ai dix ans de plus que lui, mais ça le fait très bien : on grimpe bien, on rigole bien (!).

Par contre, nous n’avions pas grimpé ensemble depuis quelques années :
il était parti -à Paris- courir après une jolie fille, pendant que moi, j’équipais avec Hugues,
les toutes premières voies de Claret.
Et puisque nous équipions de façon un peu engagée, Hugues et moi insistions beaucoup
sur la nécessité d’assurer “dynamique” (!).

J’explique donc à Jean-Yves, la meilleure méthode pour amortir la chute :
laisser une boucle de corde sous le descendeur / laisser filer celle ci et la freiner
progressivement… et en dernier recours, faire un bon en avant…

Je lui explique tout ça, car il me semble qu’après trois ans à faire du bloc à Fontainebleau…
il a un peu oublier l’escalade en cordée (!?)…

Je lui explique (aussi et surtout) parce que, là, je part dans une voie qui m’inquiète un peu : Philippe Saury, l’équipeur, l’explique lui même pour commenter la photo dans un Vertical
daté de novembre 91 : “7b+ au secteur Boss (photo du haut), 25 mètres d’escalade
pour buter sur un jeté démoniaque, dans lequel il fait bon savoir gérer
son potentiel physique”.

Hum (!) : tout est dit.

Bon, le potentiel physique, je l’ai : je maîtrise bien ce genre de cotation…
et les jolis jetés ne me rebutent pas.
Mais bon, il faut jeter.
Allons y.

On traverse la rivière et le mur est superbe : le rocher est sculpté et les grandes
coulées noires offrent ce qu’il faut d’austérité dans cette paroi à l’ombre.

D’après le topo, c’est là.
Bien. Le nœud est bien fait, j’ai les dégaines qu’il faut, les pompes sont bien propres :
j’attaque.
C’est magnifique : il y a des prises partout et je me régale comme un fou.
Le problème, c’est que je monte très facilement : rapide et fluide.
Et je me connais bien, je ne suis pas complètement stupide : j’ai déjà “randonné”
ce genre de cotations… mais là, y a un problème : toutes les prises sont bonnes
et je gambade de l’une à l’autre dans un léger dévers (!)…
Je monte, je monte, c’est toujours aussi beau mais je ne rencontre toujours pas
de grosses difficultés…
Soit je me suis trompé de voie… soit… ben ouais : “LE jeté” !
C’est lui qui cote 7b+. C’est pas possible autrement…

Et le voilà : c’est sûr, j’y suis : le mur est lisse, noir, il n’y a pas de magnésie
(encore moins de traits) et l’on devine une prise, loin au dessus de la tête.
Bon, je fais le tour du contexte : j’ai deux prises de mains / une rampe
de lancement pour les pieds / l’équipement est bien : j’ai la dernière dégaine
au niveau du tibia.

Bon. Y’a plus qu’à (!).
Je préviens Jean Yves.

Mes jambes sont bien pliées, mes bras sont tendus :
allez hop : FEU !

Je décolle bien, la prise se rapproche.
Mais ça va vite : faut savoir bien viser (!).
Et là, y’a un soucis : ma main gauche est à bonne distance mais loupe
la prise de 10 bons centimètres sur le côté !..

Et là, ça commence : la première dégaine, c’est normal, je tombe (!)…
la deuxième pareil : c’est normal…
la troisième : c’est bon : assurage dynamique…
la quatrième, la cinquième, la sixième… ouh… j’en ai mis combien ??

HAAAAAAAAAA!!! (il faut que ça s’arrête !) !

BOUM : dans un fauteuil (!). Nickel.

Le seul problème, c’est que je suis à deux mètres au dessus de la tête
de Jean-Yves. Je suis -exactement- au niveau du deuxième point (!)…

“25 mètres d’escalade pour buter sur un jeté démoniaque”.
C’est marqué dans Vertical… j’ai pris combien, là, moi ?..

Mais t’es con Jean Yves, qu’esqu’y t’arrive ?
Ca va pas bien ??

Ben si, il va bien. Il est content :
il vient de réinventer l’assurage dynamique (!).

… … …

Bon, sur le coup, j’ai un peu regretté mes insultes.
De toutes façon, une fois au Moulin de la Pipe,
il les avait toutes oubliées (!).

Allez, au revoir.

Pierre

P.S. :
Ce qui m’a terrifié dans cette histoire, c’est que la corde est resté
“très très longtemps” molle dans les dégaines qui défilaient (!).
Ou alors j’invente…

En tous les cas : j’ai les mains moites, là, à cet instant, sur le clavier du Mac…

Sans déc’ (!).

P.

Posté en tant qu’invité par J2LH:

Très drôle l’usurpateur.

Posté en tant qu’invité par Celui du récit:

Auteur: celui du récit (—.proxy.aol.com)
Date: 10 nov 2004 20:38

En lisant le récit de Pierre, je sens monter un grand sourire au fur et à mesure que j’avance dans ma lecture.
Je revis en effet ce bon moment d’escalade avec l’ami Rouzo, tant il est gravé en moi.
Ces étoiles multiples, trop nombreuses pour avoir le temps de faire des voeux.
Le ciel en était remplit, toute la nuit… Nous en avons vu des doubles ( trouble visuel?) des triples (les deux dernières bières etaient elles de trop ?).
Il faut dire que c’était la nuit des étoiles filantes, ce soir là…
Mais cà, on ne le savait pas.
Petit retour quand à la journée passée…
En effet, Pierre m’avait bien dit toute l’importance du dynamisme dans l’assurage de ses plombs. ( l’homme est fragile du dos depuis longtemps).
Et bien, je dis qu’il a été servi, ce jour là, car mis à part son inquiétude de savoir si ça allait s’arreter un jour, le vol était particulièrement bien amorti…
Il faut bien avouer qu’avec 20 bons mètres de corde, on a tout le loisir de freiner son premier de cordée…
Je ne sais pas pourquoi, mais il n’en a jamais été convaincu…

Posté en tant qu’invité par le curieux:

Auteur: Le curieux (—.w193-253.abo.wanadoo.fr)
Date: 05 nov 2004 16:30

Merci Pierre pour ce nouveau récit et tu as raison, j’aurai dû commencer par donner l’exemple mais il est vrai que mon but était plus de lire vos récits que d’écrire.
J’ai aimé un très grand nombre de voies mais celles que j’ai travaillées ou équipées m’ont laissées plus de souvenir que celles faites à vue qui, par définition, n’ont connu qu’un seul de mes passages.

L’une des dernières à m’avoir laissé de grands souvenirs est une voie que je venais d’équiper. Elle s’appelle Marquise et se trouve à Jarbonnet (Jarb pour les intimes). C’est une voie d’une trentaine de mètres comportant deux parties assez différentes avec un repos total entre les deux.
Globalement verticale sur la première moitié, elle franchit ensuite un superbe mur bleu légèrement déversant et très soutenu.
Lors de l’équipement, j’ai tenté certain mouvements mais le dévers et les traversées qu’elle comporte ne m’ont pas permis de les essayer tous. Cela me parait très dur (pour moi) et je n’ai alors aucune idée de la cotation. Je pense maintenant qu’elle se situe entre le 7b+ et le 7c mais la cotation reste à confirmer (avis aux amateurs!). Cette difficulté est très au dessus de mes capacités puisque je n’ai fait qu’un 7b après travail (au Jarb).

Quelques jours après la pose des broches me voilà au pied de ce challenge. Très motivé mais un peu impressionné, il faut que je vérifie la validité de l’équipement qui, pour rester dans l’esprit du site se doit d’être un peu aéré. Il est en effet de coutume d’être paré avant le premier point et d’avoir les pieds un peu au dessus du dernier point pour faire le mousquetonnage suivant.

Mon compagnon habituel est à l’assurage, un autre est en renfort pour le soutien moral et me voilà parti. Le début n’est pas trop dur mais les prises sont des gouttes assez douloureuses. Difficile de courir dans cette portion et les avants bras commencent à gonfler. Le premier passage un peu plus dur se présente dans le petit bombé, juste avant le repos total. Je saisi l’inversée très franche en main droite et les pieds très haut je pousse pour tenter d’attraper la prise suivante qui est bien assez loin.
Je l’ai! Il faut maintenant la tenir et poursuivre par un réta assez délicat d’autant plus que le point que j’ai mousquetonné depuis l’inversée commence à s’éloigner. Il n’est plus visible mais, à la fin du réta, les pieds sont bien à plus d’un mètre au dessus.

Le repos total est une sorte de strate concave qui vous repousse le haut du corps en arrière et comme il faut se déplacer un peu à droite pour pouvoir effectuer le mousquetonnage suivant, la position n’est pas des plus confortable (psychologiquement s’entend).

J’ai enchaîné la première moitié mais les difficultés sont au dessus. Il faut d’abord parvenir à aller chercher une inversée sous un petit surplomb à droite et la partie s’annonce rude. Je n’avais pas pu faire cette partie lors de l’équipement car elle n’était pas dans l’axe de la corde.
Même chose pour la suite à cause du dévers.
Je dois faire une traversée à droite avec des prises correctes pour les pieds alors que celles de mains se transforment de plus en plus en petites prises fuyantes. L’inversée est juste au dessus de moi, mais plus de prises de pieds pour l’atteindre. Mes compagnons qui voient la situation se compliquer commencent à m’encourager, relayés par une cordée qui, passant au pied de la voie, s’est arrêté pour regarder cette tentative audacieuse (pour moi).
Je monte un peu les pieds sur de vagues adhérences et crispe comme un mort de faim sur mes réglettes fuyantes. Je me grandit au maximum et, du bout des doigts je touche l’inversée. La main gauche n’est plus là que pour la décoration et dans cette position (extension complète) je ne peu plus faire aucun mouvement. Je suis dans une impasse mais heureusement un pied se décide à riper pour me sortir de cette situation. Premier plomb qui a le mérite de me décoincer.

La deuxième tentative (depuis le dernier point, pas du bas!) est la bonne et une succession de bonnes prises me permet de rejoindre le bas du mur bleu. Les prises rétrécissent maintenant sévèrement et s’espacent beaucoup. S’en suivent quelques mouvements teigneux.

Pour attraper la prise suivante je dois monter les pieds très haut et dans cette position les réglettes de mains me paraissent bien petites. Un jeté désespéré sur une verticale me rapproche du mousquetonnage mais la prise n’est pas assez grosse pour me permettre de lâcher la main gauche. Il faut que je parvienne à placer mon pousse sur le haut de cette réglette qui présente une aspérité qui s’y prête, mais encore une fois en extension complète je n’y parviens pas. Nouveau plomb.

Il m’est impossible de me souvenir le nombre d’essais qu’il m’à fallu pour enfin réussir le mousquetonnage mais, d’habitude réticent à prendre des plombs, je ne m’en souciait plus du tout cette fois-ci et la seule chose qui comptait était de tenir cette prise.

Proche de l’abandon je pendouille piteux au bout de ma corde et mon assureur voit arriver le moment de prendre le relais, partagé entre l’envie d’en découdre et le stress du combat à venir.

Comme dans un bon film américain, la dernière tentative est la bonne mais la suite ne se laisse pas faire non plus. Un certain nombre d’essais me sont encore nécessaires pour atteindre les deux broches du relais sous les vivats de la foule en délire (fin du film américain).

Epuisé mais heureux je regagne la terre ferme que j’ai quittée depuis si longtemps. L’équipement de la voie me parait concluent. Il me reste une chose à faire mais ce ne sera pas pour aujourd’hui : L’enchaînement !

L.C.

Posté en tant qu’invité par Tim:

Auteur: Tim (—.fbx.proxad.net)
Date: 05 nov 2004 20:08

bon, allez, une petite autre pour satisfaire ta curiosité (et pis là j’ai une furieuse envie de grimper, donc ca compense un peu, faut reconnaitre le côté aide psychologique de camp to camp quand même).
Donc, c’est un samedi matin d’avril, si je me souviens bien. quoiqu’il en soit ce jour là il pleuvait, enfin pleuviotter plutôt. j’avais rendez vous avec Ju’ au p’tit des’, site assez sympa de grenoble par sa proximité et son environement (bon ses voies aussi, mais à force d’y aller on s’en lasse un peu).
Malgré la bruine je me rend quand meme au rendez vous en prenant bien soin d’éteindre mon portable histoire d’être certain qu’il ne puisse pas me joindre, et pis… je connais la gentillesse exeptionnelle de Julien. s’il peut pas me prevenir, il viendra : me voilà à l’abris d’une éventuelle démotivation due à l’humidité ambiante.
je retrouve Ju’ sur le parcking et, heureuse surprise, il est aussi motivé que moi. on décide donc d’aller jeté un oeil aux lignes eventuellement seche.
dès le debut on s’arrette devant deux voies legerement deversante, seche, et dans un niveau adequat pour s’echauffer. on s’y lance et tant que ca deverse tout va bien, mais dès qu’on se rétabli sur les partie moins raide de sortie, et malgré les arbres qui surplombent les voies, le rocher est trempé. heureusement, les sections de sorties sont pourvues de bons gros bacs et on atteint les relais sans probleme.
Le problème crucial par contre, c’est que l’essentiel des voies du petit desert sortent dans les dalles, particulièrement les voies dures (à notre niveau on s’entend)… que faire ?

je regarde la ligne à notre gauche : c’est un 7b légèrement déversant qui remonte une fissure et fini par un p’tit surplomb… le relais est juste au dessus du réta, donc toutes les chances que la pluie ne pose aucun problème. C’est vraiment au dessus de notre niveau (et particulièrement du miens, j’étais déjà été voir dans le 7a, mais je n’en avais encore jamais enchainés, alors que Ju’ en avait quand même quelques uns à son actif), mais bon, il y’a pas grand chose d’autre à faire, donc je me lance : je vais aller pauser les degaines voir ce que ca dit.
et, ca passe plutôt bien !!! bon bien sûr je prend mon temps et étant parti pour travailler la voie je ne me prive pas de me reposer sur les dégaines. c’est la première fois que je me prete a ce genre d’exercice (l’apres travail prémédité), et je m’attendais à lutter à chaque pas, or tous les pas passent assez rapidement… je suis tout de même assez étonné mais bon, après peu de temps j’arrive au relais en me disant qu’avec un essai ou deux ca peut faire : quelle erreur, dans mon inexperience, j’ai effectivement sortie tous les pas, mais il faut voir avec quelles méthodes… et s’il est facile d’enchainer pas de bloc sur pas de bloc en se reposant tous les trois ou quatre mouvements, c’est diablement plus dur de les enchaîner (et avec les premières méthodes imaginées, tout simplement impossible pour un petit scarabé de la grimpe comme moi).
Julien se lance à son tour dans la voies, et à force d’y monter cette séance nous permet de dégager chacun une méthode, semblable à peu de chose près, seule la sortie différe, je profite en effet de ma taille pour éviter quelques mouvements que la satané rési de JU’ lui permet de réaliser).
nous en sommes alors environs à 5 essais chacun ( je vous épargne les détails ;o) ).
deux jours plus tard, le soleil est revenu, et nous aussi !!! Tous les deux persuader qu’aujourd’hui ca va faire !
je vais pauser les dégaines et je repere à nouveau les mouvements : bon, ca semble ok. Ju’ fais la même derriere. Et nous voila parti pour nos tentatives : elles sont infructueuses : Ju’ tombe à chaque fois sous le relais, et pour ma part, il semble qu’un pas ne soit pas bien regler un peu en dessous : il faut tenir une reglette en épaule main droite dans le plus fort du surplomb, monter le pied gauche très haut dans un dièdre évasé, sur une bossette existante sans doute uniquement grace à la gomme laissée là par les grimpeurs précédents, tout ça pour aller attraper un bi avec la mains gauche très très loin au dessus: enfin bref ca fait pas… a chaque essai je gagne quelques centimètre, mais à ce rythme là j’y serais encore six mois après…
comble de la frustration, ce pas, ainsi que celui où bloque Ju’, font parti de la section où nos méthodes diffèrent. nos conseils respectifs sont donc de peu d’utilité pour l’autre.
Je me lance dans un dernier essais (le quatrième ou cinquieme de la journée) après mettre reposé un bon grosse demi heure, mais rien ni fait je tombe toujours au même endroit… arf la motivation commence à baisser sérieusement… en redescendant je retente le pas en moul’, mais je ne tiens meme plus les prises… hum, j’ai peut être vu un peu grand finalement …
quand j’arrive en bas, Ju’, lui, est énervé à fond, il se lance, avale les 4 cinquième de la voies comme si de rien, passe le réta un peu mieux que dab’… vacille un peu sur la prise de pied final, repousse dessus… et sa main agrippe enfin le fameux bac final !!! ahhh, le petit saligaud (je dis ca mais je suis bien content pour lui quand même). je lui intime l’ordre de ne pas desequiper la ligne : la motiv’ est revenu directement à la vue de sa réussite. Et, malgré mon épuisement précédent, je me rejette au combat. j’enchaine, à ma grande surprise vu mon état de fatigue, sans trop de difficulté jusqu’au srplomb final : là je monte mon pied bien haut et sans coup ferir sur la bossette de gomme, je pousse dessus, bloque bien fort sur la régletteet, ô miracle, j’attrappe enfin ce maudit bi-doigt… eheh, la fin ne me posant pas de soucis, je me vois déjà enchainer juste derriere julien… mais, que ce passe t’il, oula, le pas suivant dans l’enchainement (et surtout apres 5 essais) est bien dur. je me tracte peniblement sur le bi…et ahhhhhhh
me voila pendouillant cinq mètres plus bas. y me reste plus qu’ desequiper la ligne et à rentre chez moi.
Mais, l’espoir est revenu, ce pas sur lequel je bloquait est enfin passé, tout est à nouveau possible, surtout que à ce moment j’imagine qu’avec un peu plus de faricheur la fin se fera sans probleme.
Je passe trois nouvelles journée à me répeter la voie, jusqu’à en rêver, je connais chaque mouvement de pied, comme de main, au millimètre… c’est sur la prochaine fois c’est la bonne.
Le vendredi, je requisitionne un poto de c2c, matteo en l’occurence, et nous voici parti pour une troisième séance. une montée pour pauser les paires où je randonne tranquilement les pas (avec un repos je crois), une ou deux p’tite voie réalisées par mattéo pour me laisser le temps de me reposer.
hop c’est parti pour l’ultime essai … j’arrive au bi-doigt, je monte le pied droit en carre externe sur la reglette pile dessous pour aller chercher un bon gros plats avec la main droite qui me permettra de mousqutonner la dernière paire avant d’enchainer la fin que je maitrise sur le bout des doigts… pffff, malgré ma fraicheur il est vraiment loin ce plat après avoir enchainer…arggggghhhh, je m’aggrippe a tout ce qui traine pour essayer de relancer… pfffiuuuu, je sens que ca va lacher… tant pis je jette de desespoir sur le plat…et aahhhhh, bam me revoila pendouillant au bout de la corde… pffffuuuuuu, p#%$£n c’est pas possible… en plus voila que l’orage se met à tonner.
c’est décidé, l’ultime essais dans 10 mns et apres je raye cette voie de ma memoire, enchainement ou pas.
13 mn après j’ai à nouveau le bi doigt sous les doigts justement, mon pied est sur la réglette, je pousse, mais, arf c’est loin, soudain un éclair de génie traverse mon esprit et je m’appuie sur la grosse écaille sur laquelle je croise génèralement avec la main gauche après avoir mousquetonner… et là ca fait, je choppe le plat, je mousquetonne, je croise, prend une première prise pas spécialement bonne avec la main droite, déplace mais pieds, relance la main droite … et attrappe une bonne prise. en bas j’entends à peine les encouragement de matteo et de deux autres grimpeurs qui se sont joint à lui, alors que le pote arrive au relais de la voie d’à coté en même temps que moi… ca y ets c’est fait… ahhhh comme c’est bon. je m’etais promis de ne pas hurler, mais la c’est vraiment trop bon, alors tant pis pour la bienséance, je gueule ma joie à plein poumon alors que le ciel m’accompagne !!!
a peine redescendu, l’orage eclate pour de bon et c’est sous une pluie battante qu’on rentre aux voitures, trempés mais vraiment heureux !!!

voilà, encore une fois, ca a été sans doute un peu long, mais soyez heureux je vous ai épargné l’enchainement complet de la voie que je connais encore 7 mois après, ;o). bon juste le nom de la voie pour finir : l’anus de milo, et forcement c’est beau :o) !!!

Posté en tant qu’invité par Lemmings:

Auteur: Lemmings (—.proxy.aol.com)
Date: 06 nov 2004 22:42

Bijour, bijour!
Puisque tout le monde se prete au jeu je vais moi aussi vous raconter une histoire.
L’histoire en question s’appelle « Traqueur de lunules »,6b à Quinson dans le Verdon ,à la grotte au dessus du rouge pour ceux qui connaissent.
Mon coequipier s’appelle -ou se laisse appeler-Falavier (comme la salade,si, si!)
ou"l’homme qui tenait sur rien et qui défiait toutes les lois fondamentales de la physique, la gravité en particulier!" Mon premier 6b, l’émotion m’étreint!
Le dit Falavier étant plus fort que moi, je le laisse partir en premier pour poser les paires dans ce petit dévers de 8/9m tout rempli de grosses lunules.
Comme prévu le camarade enchaine ce qui me rassure pleinement et me motive beaucoup.
Je pars.
Le début se passe sans accrocs, une série de gros bacs en diagonale bien péperes juste bons pour s’échauffer tranquilou.le pas de la voie consiste en un coincement du pied gauche dans un bac situé trente cm en dessous et à gauche de clui dans lequel mes deux mains sont ,puis m’aidant du pied droit mis en adhérence en dessous je pousse d’un coté, tire de l’autre de toute les forces de mes petits bras maigres pour envoyer main droite salement dynamique sur une prise qui n’a du pommeau que le nom que Falavier lui a donné (celui la, j’vous jure!!!) pour ensuite renvoyer sur un vrai pommeau ce coup ci. OUF, le plus dur est fait, la fin m’a tout l’air d’etre de la petite dalle tranquille. Mais quel est donc ce bourdonnement? un drole de bete jaune et noire me tourne autour en volant avec insistance, suivie peu apres par 3, 4, 5 de ses congéneres. Des frelons!Tout un nid et j’ai la main dedans! aaaAAAArrgh! bloooooooque!!! S’ensuit un petit vol de quatre ètres puis une redescente en douceur sur le plancher des vaches, le coeur battant à 6000!Ouf, ca c’est de la grimpe que j’aime! du sport et des sensations fortes, mais heureusement pas de bobos ni de piqures!
Retour au camping les jambes encore tremblantes suite à la frayeur et au vol.
Qui c’est qui va faire plein de beaux reves cette nuit?
Voila voila,quatre ans on passé depuis cette (mes)aventure et je revois en core aujourd’hui la tete désolée de Falavier devant la grosse pierre plate posée au bas de la voie, avec gravé dessus à la craie les 7 lettres maudites:
FRELONS!
Lemmings

Posté en tant qu’invité par Pierre Rouzo:

Auteur: Pierre Rouzo (—.fbx.proxad.net)
Date: 08 nov 2004 12:54

Bon, allez, je me suis pris au jeu du sieur Le Curieux :
une autre petite histoire de «Plomb du jour» (!)…
La même ou presque.

(Au fait, ceux qui aiment les histoires, rigolotes et bien racontées,
doivent se brancher sur les chroniques de Jean Pierre Banville
sur http://escalade-alsace.ifrance.com/escalade-alsace/ ).

Pour moi (et c’est bien moins dit), c’est à Claret : je viens d’équiper «Gazoduc».
Joli nom, mais presque trop facile : une belle colonne (bien droite, noire et bien marquée),
couvre -sur la hauteur- presque toute la moitié de la voie (!) : irrésistible pour un équipeur.

Sans malice aucune, Hugues avait pour habitude de me demander d’aller essayer
ses toutes dernières voies. Celle-ci, c’est la mienne.
Je dis «sans malice» mais j’en doute un peu : plusieurs fois, j’était parti dans un
de SES 7b annoncés, où je m’étais mis des combats et (ou) pris des râteaux
que je ne suis pas prêt d’oublier !

Mais bon, c’est vrai qu’il est toujours difficile de coter -avec précision-
une voie que l’on vient à peine d’ouvrir… faut l’essayer (!).
Avec Hugues, pas de surprises : il ne se trompait JAMAIS…dans l’autre sens.

En plus, je n’étais pas le seul à faire les frais de ces grands moments de découverte :
François(Fromaget) ou le marmot (Daniel Dulac) se sont pris de jolis cartons dans des voies
qui finirons -sur le topo- par être cotées 7c ou 7c+ (!)…

Du coup, et puisqu’il refusait souvent d’être le premier à découvrir mes propres voies,
je lui avais proposé la méthode du «chacun pour soi» (en fait, à l’époque, il ne se passait
pas un jour sans qu’une nouvelle voie soit à inaugurer.)
----«Hugues, tu m’emmerdes (!), l’ouvreur n’a qu’à se taper un essai -en premier-
dans SA propre voie. Et toc !».

Bon, ce jour là, je suis devant «Gazoduc» et je ne suis pas très fier.

C’était un temps où, sans nous concerter, je NOUS soupçonne de nous être tirer
«un peu» la bourre concernant l’espacement des points (!).
Espacement que nous devions -bien sûr- être capables d’assumer EN PREMIERS !..

Bien…
je pense que, dès maintenant, je peux vous avouer que l’équipement de «Gazoduc»
a été revu et corrigé juste après cet essai «à vue d’ouvreur» comme l’on dit
assez justement maintenant (!)…

La voie démarre facilement, sur une rampe d’accès joliment sculptée.

Bien…?
Maintenant, il est assez bien venu de bien se poffer les mains :
s’il y a une colonne, c’est que ça déverse… et l’on ne sait jamais très bien
ce qu’il va nous arriver… dure, pas si dure, tordue, abordable (?)…
Moi, perso, là, devant cette coulée, je ne sais pas du tout à quoi m’attendre…

Ce que je sais -par contre- c’est qu’en équipant, J’AI engagé (!) (comme d’hab’).

J’ai engagé pour le simple plaisir de faire de la «belle» escalade : engagée (donc), radicale,
exigeante et passionnante car remplie d’émotions et de motivation !
En deux mots : l’escalade pour moi, c’est : je pars du bas et JE VEUX arriver en haut !
Proprement, par mes propres moyens, sans bricolages, sans bidouillages
et sans faux semblants ! A fond, SURmotivé par l’envie de réussir.

Zou : j’attaque…

Hoooo, mais c’est SURdur : la colonne n’est pas encore atteinte que je tricote déjà
des ruses pour les placements, cherche des pieds pour atteindre des prises de mains
que je devine à peine. Découverte / intuition / décisions : génial (bonjour chez vous Mr Trait !)…

Putain : je force là (!).

Bon, la colonne.
Là, je connais un peu : tu ne réfléchis pas, Pierre, tu fonces !

De face, hein, pas de ruses possibles sur «le Gazoduc» :
le tube n’est pas bien gros, il n’y a pas de repos miracles à espérer :
oublie tes techniques de sioux et tes coincements de genoux : FONCE !
Faut sortir les pinces : main droite, main gauche, le corps à droite, le corps à gauche,
je mousquetonne une fois, deux fois, je montes les pieds sous le menton…
JE POUSSE !


Et ça le fait.
Ouf, j’en ai fini avec cette satanée colo’.
Bon, qu’eski reste ? Houlaaa, le relais est encore vachement loin (!).

Allez : c’est «TA» voie, tu as mis deux jours pour l’équiper, et -comme d’hab’-
tu vas ne mettre que cinq minutes pour la gravir (sans mentir, je grimpe vite).

Bon. Alors… y’a l’air d’avoir de la prise dans ce mur (!?)… oui, oui, ça a l’air…
Mais bon, elles sont loin (!)… et moi, là, je suis super loin du point, maintenant !

HOuuuuu, bon : généralement, quand tu équipes, tu sais ce que tu fais :
la meilleure prise est au niveau du point (!)… parce là, t’es sur des «pas très bonnes»…
et t’es pété… AVANCE !

Et j’avance, j’avance, je suis SURmotivé (!). En plus, c’est mon pote qui m’assure,
j’ai toute confiance en lui : il me connaît, je le connaît, on fait attention l’un à l’autre…
Le prochain point est là… je jete sur le baquet (c’est peut être la seule prise
dont je me souvient) :

ET MERrrrrrDE (décidément) : je touche à côté !

Allez, dans l’autre sens, zou : A FOND !

Putain,C’EST LONG… mais ça ne dure pas…


BOUM : encore vivant !

Super.


Super, mais c’est Hugues qui est aux manettes
(heureusement) : si on laisse la voie comme ça, va y avoir des morts :
MES PIEDS TOUCHENT SA TETE !!!

Allez : à r’com’ ! Faut rejouer du perfo.

Plusieurs voies ont donc été rectifiées après ce genre de crash-tests,
effectués par les ouvreurs (!).

Maintenant, toutes les voies sont sûres.
Attention, à Claret il est formellement déconseillé de confier son assurage
à un berlingo tête en l’air !! L’escalade, c’est QUE du plaisir (!) :
n’allez pas vous faire mal (et surtout pas à cause des autres) !

Allez, au revoir.

Pierre

P.S. : si un jour vous me voyez grimper : inutile de rigoler, ou de vous foutre de ma gueule.
Gardez vos sarcasme sous capes : j’ai une prothèse de hanche et pleins d’autres trucs
en ferraille dans le corps, et le moindre choc m’envoie direct à l’hôpital.
Et ça, j’ai plus envie. J’ai ma dose.

Donc : hélas pour moi, je ne grimpe plus qu’en moulinette.
Mais bon, avec des histoires comme ça, en escalade,
j’ai eu droit à une grosse part de bonheur (!!)…
Une TRES GROSSE part même.

P.

Posté en tant qu’invité par N.Robini:

Auteur: N.Robini (—.cust.tele2.fr)
Date: 14 nov 2004 21:31

Salut à tous,

Bon…

J’interviens pour la première fois sur C2Camp, et je n’ai pas campé encore chez personne…
Alors pour faire plaisir à Mirabelle, et mon cher Pierre Rouzou qui n’hésite pas à assassiner (rires) mes actions (qui aime bien chatit bien), et me fait progresser dans ma littérature, art que j’excerce surtout auparavent sur le forum de Nice-Climb.com où parfois je fut bien plus virulent (un certain Pierre Rouzou d’ailleurs ;-)) et les membres du collectif.

Donc, quel plaisir de prendre part à un débat de cette manière où pour une fois aucune animosité ne regne, LANCONS NOUS !!!

Donc voici mon post d’hier soir !!! (j’ai repris qq fautes d’orthographe)

Je consulte ce forum, mais n’ai jamais pris part ni intervenu d’ailleurs.
Première donc.

J’ai lu avec un grand intérêt vos histoires de Couennes, sujet qui nous concerne tous.
C’est d’ailleurs un grand moyen de faire rêver, réfléchir, apprendre, transmettre, partager, développer à l’infini notre imagination, bref, ces lignes, sont la source de grandes énergies, tant sur le plan imaginatif, que physique.

De plus, pour une fois sur un tel sujet, tout le monde peut prendre part, c’est pourquoi je relance ce débat : QUELS SONT VOS PLUS BELLES LIGNES ? (équipées ou grimpées).

J’ai 32 ans, quelques 8a dans ma poche un soupçon de 8b, peut-être plus (les répétitions futures confirmeront ou non…)
Des voies majeures, j’en ai grimpé, et équipé (65lignes à mon actif).

Mais quelle est la plus belle ligne ?
Celle qui s’enchaine à vue après un combat épique ?
Celle qui se réalise comme du papier à musique ?
Celle qui est libérée pour la 1ère fois ? (ouvreurs ou non)
Celle qui ou l’on a réussi d’aligner tous les mvts après 25 séances (grande sensation de victoire exhaussée après tant d’incertitudes…et échecs…)
Celle ou l’on a risqué très gros et l’on ne retournera plus ?
Celle qui ne s’enchainera jamais par soi-même ?
Ou bien celle que l’on prend simplement un grand plaisir à regarder ?
Celle où l’on a passé un temps énorme à nettoyer pendu sur une corde chacune de ces prises avec minutie (jusqu’à en être dégouté…mais le résultat fini : Grandiose)
Observer quelqu’un évoluer dans ses propres lignes en prenant son pied ?

ALORS ?

Moi même, j’ai vécu tout ces moments, ces impressions.
Chacun d’eux est important dans la vie d’un grimpeur à mes yeux, ne serait-ce pour sa son savoir, des moyens d’aprécier les choses de valeur, de qualité, qui ont une âme, un karma.

Et ces voies doivent continuer d’être pensées, crées, sans marquer irrémédiablement en taillant et « Sikatant » comme il est si facile de faire lorsque l’on équipe.
Quel intérêt ? Faire des lignes majeures, c’est prendre le temps de la traquer, imaginer, défricher, tout comme un surfeur cherchant toujours un meilleur spot que le précédant.
Se confronter avec ce que Dame nature nous propose, suggère est merveilleusement intéressant, angoissant parfois (lorsque l’on pense que celà ne fera jamais).

Ma plus belle ligne est celle que je n’ai pas encore équipée, car celle-ci me fera toujours rever, me motivera et me donnera toujours un but de plus pour partager avec mes amis, grimpeurs donnant de l’intérêt à l’énorme temps que je passe bénévolement sur mes « StaTs », me sortira de ma torpeur qui m’incite à ne faire que consommer comme mes chers voisins Mr T’s.

Après, tout comme chacun, des anectodes, j’en ai des tas, ma plus belle est une voie que j’ai passé 6jours à équiper par 0 à -8°C. Je l’ai libérée après une bonne Quinzaine de séance (je crois!!!)
Aucun essai ne fut inutile quant à sa libération tant le coté aléatoire fut difficile à gérer loin au dessus des clous !!! Cette voie nommée Vortex fut mon Totem Indien, m’empechant parfois même de m’endormir, je revais la nuit de trouver un pied salvateur pour réussir l’énorme pas de bloc dans cette voie…suivi de satanés mouvements dynamiques demandant bcp de fraicheur pour les aligner…avant d’arriver à un relachement pour finir sur des bords de doigts 4 mètres sous le relais.
C’est l’engeulade de mon assureur qui me fit la réussir après un essai loupé, me disant d’y retourné dans cette fameuse séance. J’y suis retourné avec moins de moyens physique, mais ce léger manque m’a poussé à être bien plus précis par économie… qui m’a fait toucher le relais frais comme un gardon !!!

A vous les Studios, ici un grimpeur passionné qui vous rend l’antenne !!!

Nicolas Robini
Themasked@netcourrier.com

Posté en tant qu’invité par Pierre Rouzo:

Allez, encore un petit texte refusé -lui aussi- mais par Grimper cette fois
(motif évoqué par Laurent B., rédacteur en chef : deux histoires en une (??)).


Loin du rayon bricolage,
certains équipeurs gardent la passion du rocher:
le vrai, le beau, le naturel (!).

Et puisque le 8c se généralise, que le 9a se concrétise et que le 9b
se fait gloser en Charente, je me suis pris, perso, un malin plaisir à ouvrir
une voie fantaisiste et fantastique dans l’un des jardins
qu’affectionnent les gros bras: Russan.


Lorsque Hugues B. ouvrit «Roubignolles», seul, du bas,
en y collant des broches et en deux jours de temps…
je dois dire qu’il m’a estomaqué : un plafond de 15 mètres à lui tout seul,
c’était quand même pas rien !

Je connaissais l’énergie physique et les capacités techniques,
que ce fou furieux était capable de déployer lorsqu’il avait décidé d’ouvrir
une nouvelle voie : nous avions équipé presque deux ans ensemble, à Claret…
Mais là quand même… sur deux jours de travail, il a dû redescendre
une fois pour pisser et puis c’est tout (!). Fallait voir l’impact du baudrier
sur le corps du forcené après un voyage de 6 heures entre les stalactites…
Fallait voir aussi sa tête : les dreads en bataille, le pif plein de poussière
et le regard qui trahit la fatigue…
Un dernier regard sur la voie… et on s’en va.
On remonte le matôs, plus les trois sacs de cochonneries
que j’avais collectées.
Et puisque le chemin passe SUR le toit et tout près du trou de la baume
percée, nous nous sommes (bien évidemment) arrêtés au bord
de l’un des trous pour admirer son relais tout neuf (!).
On est rentré de nuit, encore une fois et à point d’heure…
Comme d’hab’.

Claret justement: quelques 160 voies en 2 ans et plus de 130 itinéraires
à mettre à l’actif de ce frapadingue de rasta !
Qui n’a jamais équipé, ne peut -hélas- imaginer la somme de travail
que cela peut représenter (pour le pognon, c’est plus facile :
tout le monde connaît) (!)…

Aux ”Branches”, en Ardèche, il m’avait -aussi- mis sur le cul : pendant
que les autres stagiaires révisaient leur U.F.2, il partait seul, dans son coin,
équiper des choses complètement folles en lançant des lassos sous les
concrétions pour pouvoir penduler, puis remonter aux jumards pour finalement
s’y agripper ! Et comme le monsieur n’était pas très vantard, personne
ou presque, ne savait précisément où il disparaissait…

Et l’incroyable est vrai : pour cette U.F., Hugues s’est vu sanctionner
d’une mauvaise note en é-qui-pe-ment !!!?

Dans ce domaine, nous, qui connaissions l’engagement et les compétences
de ce pur autodidacte, étions morts de rire pour cet échec cinglant.
mais comme l’injustice était tellement flagrante et les petits chefs décideurs
d’une incommensurable bêtise, nous étions aussi, très énervés
par cette sanction !

Vous voulez des noms ?
En voici un : Joël T. Ce monsieur, formateur de son état, déclarait -par exemple-
que pour faire tenir des broches dans un toit (le temps que le Sika ”prenne”),
il fallait les coinser avec des allumettes… ???
Ha bon? combien? une boite entière? une petite? une grosse?..

A Claret j’avais trouvé un truc tout bête -et surtout imparable- pour
empêcher les broches de “dégouliner” de gravité pendant la nuit : il suffit
de laisser intactes les bavures entre le trou principal et les deux trous d’encoches…
puis de frapper sur la broche. Radical.

Résultat : l’astuce proposée par Hugues -à voix haute lors d’un cours d’instruction-
fût déclarée ”nulle et non avenue”… par LE professeur !
(c’est pas beau, çà ?!).

De ce séjour en ardèche, hugues m’en avait raconté les détails
et j’étais assez content de ne pas courir, moi-même, après ce fameux B.E.

Quelques mois plus tard, les 2 et 3 juillet 93 précisément, nous étions
tous les deux sous la baume percée du Castelas, à Russan donc.
Il était maintenant diplômé d’un brevet d’État tout neuf, et moi je faisais ”l’arpète”
en lui passant les outils et en préparant, au sol, le mélange du Sika.

Pourtant, nous nous étions déplacés avec chacun un projet dans le sac
(donc chargés comme des mules comme de bien entendu) :
à moi, cette ligne de colonnes à l’approche impossible (?), à lui,
cette gigantesque paire de burnes pour attaquer le toit (!).

Sortir par le trou de la baume, suffisait à magnifier son projet.

Quant à moi, après avoir posé le relais et avoir tendu la corde au point
qu’elle finisse par sonner «claire» dans le début des aigus…
je me suis un peu «chié» comme on dit ! J’ai pris peur.
Et l’autre, là, le Hugues, qui se fout ouvertement de ma gueule (!)…
Le rasta n’est pas longtemps resté hilare : deux minute après,
il se prenait un monstre pendule qui le ramenait plein pot dans les
roubignolles du départ !!
Après le fracas de la chute et le sachant dur au mal :
à mon tour de me tenir les côtes ! HaHa !!

N’étant pas membre de Scalata, le ”chef” du club s’était logiquement réservé
la statique la moins suspecte. J’avais pour ma part, une corde méchamment
abîmée par un jeune grimpeur inconscient, qui l’avait prise pour balançoire
sur l’un de nos chantiers à Claret…

Vous voulez un nom ?
Le voici : Sam B. Vous voulez connaître la punition que nous lui avons infligée ?
Un pot de Sika à payer sur son argent de poche !
«argent de poche», car ce pauvre Sam était encore bien trop «jeune homme»
-à l’époque- pour imaginer, un instant, que Hugues ou moi pouvions nous tuer
dès le lendemain en remontant sur une corde ”mangée” par son jeu de la veille…
C’est du passé et j’aime bien Sam (maintenant).

Monter aux jumards sur une corde hyper tendue, avec un gros nœud tricoté
au milieu pour en éviter la rupture, donne plutôt envie de rentrer chez soi
et de regarder une grosse connerie à la télévision avec une petite bière en main
et un chat sur les genoux (!?).
Ce jour de juillet 93, j’ai donc renoncé.

Du coup, avoir simplement ”aidé” Hugues à ouvrir une si belle voie
dans la grande baume, ne pouvait évidemment pas me suffire !

6 ans après, j’ai donc repris mon projet à zéro.

Et c’est pour cela que je vais vous nommer -dans l’ordre d’apparition- les gens
qui m’ont, à leurs tours, donné un coup de main pour équiper la grande sœur
de ”Roubignolles” :

  • Nono M. ”Grand maître glandeur, maître mouffleur et chef déconneur
    sur ondes courtes”,
  • Lucien B. ”Grand maître râleur, maître du contrepêt et chef contemplateur”,
  • François T. ”Grand maître de cuisine en milieu hostile”.

Ces trois loustics m’ont treuillé, moufflé, tiré, soutenu d’un pied,
d’une main, m’ont tenu l’échelle, passé les outils, m’ont donné du moral
et de la volonté, donné des conseils…
et quelques fois, cassé les oreilles pour rester poli !..

En tout, 9 jours de travail.

Si à 20 ans on baigne encore dans la jouvence, si à 30 on pète le feu
comme un damné, une fois 40 années passées…
on souffre «un peu» quand même (!).
Car, même bien entouré, ça reste extrêmement difficile d’ouvrir des voies
d’une telle ampleur (Mrs Mussato, Piola et autres : bravo pour vos réalisations !).

Equiper ”du haut”, quand il y a près de 20 mètres de plafond, 15 mètres
d’énorme dévers et 10 mètres de dévers moyen…
ne veut plus dire grand chose.
Si : ça tue !

Et bien sûr, j’ai juré (une fois de plus) que ce coup-ci,
c’était vraiment la dernière !!

A l’époque, Médérik T. voulait tailler des prises pour pouvoir attaquer
cette belle ligne de colonnes. J’ai décidé -pour ma part- d’aller chercher
les prises là où elles étaient. c’est à dire, 20 mètres plus à gauche,
dans le plafond (!).

À l’occasion d’une compèt’ de bloc à Millau, j’ai invité tout le monde
ou presque : les amis bien évidemment (les copains d’abord!), ensuite
les petits jeunes du coin qui ”poussent” vraiment très fort, et finalement,
tous les vrais ”cadors” que l’on voit dans les magazines : des Daniel D.,
des Arnaud et François P., des Jean-Luc J., des Yann G., des Paul D.,
des Salavat R. des Olivier F., des Ludovic L., des Laurent L.,
des Jean-Baptiste T., des Patxi A. des Jérôme R., des Samuel B.,
des Laurent T… et même des C.T.R.!

Tous étaient conviés à l’inauguration «officielle» de cette putain de ligne
que j’ai nommée ”Les yeux plus gros que le ventre”.
La petite carte d’invitation était pourtant sympathique et chaleureuse
mais seuls les copains sont venus. dont un quatuor de millavois,
justement (:).

Après un échauffement sordide sous un soleil de plomb, ces messieurs
ont enfin ”décidé” -sous mes menaces- d’aller un peu taquiner
cette voie nouvelle…
Ivan d’abord. Ivan qui en voyant la ligne m’a immédiatement traité
de demeuré ”limite à enfermer”. Comme quoi, il est toujours très agréable
de se faire complimenter par ses propres amis.

Donc, départ intimidant mais «presque facile» sur d’énormes ”choux-fleurs”
et ”patates”. Presque facile, mais fatigant.

Ensuite Olivier, qui sur une bonne idée de Nono, attaque, là où Ivan
s’était fatigué. Olivier est un grimpeur teigneux mais aussi un
mathématicien lucide : ”y’a un crux là, non ?” et quatre tentatives
plus tard : ”ça passe. C’est sûr”…
Juste après, Géraud. Ce grand costaud se cogne les bas morceaux :
les durs ! Trois essais de gros jetés à l’horizontale lui font dire que
”ça fait”. C’est super, j’en étais sûr… La suite !

Quand Raphaël s’y colle, seule une moitié du plafond a été ”imaginée”.
Et c’est bien normal, les quatre de Millau taquinent à peine le 7c/7c+
à vue et font évidemment figure de demi-pointures.
Seulement, Raphaël tient les prises. Les tient, et tire dessus comme
un forcené. au point d’en arracher une ! Le toit est farci de choux fleurs,
patates, stalactites et autres meringues…
mais attention à ne pas en casser trop (!).
Là,”ça fait” quand même.

Ouf. à qui le tour ?

Au sol, on se régale: le spectacle est à quelques mètres au dessus
des têtes, les bières roulent, les pétards tournent et les bonnes
victuailles du buffet s’ingurgitent de manière gourmande…
Au point que maintenant, les prétendants se font rares !

Dans ce clou à clou pour la conquête d’un point nouveau,
Ivan s’y recolle (trois brassées de jumards et essais libres à volonté) :
”y’a un pas, là, hein!?”. Moi, j’opterais plutôt pour un ”passage sordide”.
en plus, je sais parfaitement que ce n’est pas le dernier…
ils n’ont pas tout vu (!).

Mais Ivan est malin. en deux temps / trois mouvements, il esquisse,
en direct, une possibilité… puis renonce.
Nous sommes au 2/3 de la voie.

Olivier trouve une nouvelle ruse sans réussir pour autant.
mais encore une fois, ”ça fait”.

C’est dit, et c’est ce que j’aime entendre.

Géraud quant à lui, bataille comme un beau diable sur les colonnes
de droite. ça ne le mène pas bien loin mais il réussit tout de même
à mousquetonner le point suivant. Ouf !

Olivier y retourne, bataille ferme lui aussi, et tombe encore sur un
pas sordide… ça vire au combat de rue, mais…
”ça fait” (décidément…).

Plus que 15 mètres pour attraper le pompon.

Le pompon : j’avais fixé, au bout de la corde du chantier, un vieux
débardeur qui servait à cacher le nom de la voie.
Une fois tous réunis (nous étions quand même une petite trentaine),
Nono et moi avons tiré lentement la corde et fait défiler le tissu
dans les 19 points de la voie jusqu’au relais.
Le pompon s’y est coincé et d’un coup sec, nous avons fait s’arraché
l’étiquette sur laquelle le bout de la corde était cousu.

sur les invitations était marqué ”inauguration officielle”,
le protocole était prévu… et fût respecté.

Plus que 10 mètres.

Hélas, las d’en découdre avec les dernières petites prises
(le meilleur pour la fin !), Raphaël dû renoncer à la tombée du jour.

Voilà, ce dimanche 30 mai fût un jour d’exception.
tout le monde avait l’air content.
Et même si aucun d’entre nous n’imaginait pouvoir enchaîner
cette voie un jour (tant nous étions ”hallucinés” par l’immense
beauté de cette nouvelle difficulté proposée par la baume)…
La journée fût belle.

Nous nous sommes congratulés, remerciés les uns les autres,
puis on est séparés.

Sur le chemin de retour, j’ai entendu dire que le nom était
«trop» bien trouvé.
Ce à quoi je n’ai pas eu le temps de répondre, que ce nom ne s’appliquait
pas qu’aux seuls cocheurs de croix, mais aussi à l’ouvreur : ce chantier
fût pour moi un réel défi (mon projet ”de dans 6 ans”) !

Ce nom, inscrit tout à coté de ”Roubignolles”, s’applique aussi
à mon ami Hugues, mort comme un con à l’autre bout du monde.

Ce fameux Beauzile, au si particulier caractère -radical et volontaire-
mais que les trois points d’exclamations «vindicatifs» qui suivaient
sa signature d’artiste, n’ont pas suffit à le ramener vivant du sommet
d’une montagne trop belle pour lui…

Tout au long du chantier, j’ai pensé à cet imbécile.

Pierre R. / Montpellier


Suit un petit texte, publié -lui- dans le courrier du Grimper de mai 2001 :

Deux ans après son inauguration officielle, deux jeunes grimpeurs viennent
de réussir… TOUS les pas de la voie (!). Du début des essais où la voie avait
été déclarée «imaginable», elle est aujourd’hui créditée du mot «faisable».
Et s’il manquait deux pas à Olivier P., son ami Gaston (Laurent V.)
vient d’en résoudre l’équation. Donc, ça fait ! L’ouvreur, qui était présent ce jour là,
en faisait des petits bons de contentement, en ne cessant de féliciter
et de remercier ces deux jeunes défricheurs, décidément «pas timides».
Outre le problème physique (musculaire) lié à un tel enchaînement,
deux autres problèmes se font jour : tout d’abord un problème de mémoire.
Avec plus de 200 mouvements et déplacements, il ne faut pas confondre
une stalactite qui offre un point de décontraction, avec une autre qui n’en
offre aucun. Ensuite, un problème d’oxygénation : Olivier, après un essai
«le plus loin possible», s’est retrouvé avec un mal de crâne impressionnant.
20 mètres de plafond avec des blocages dans tous les sens, font vite tourner la tête…
avant même d’aborder les VRAIES difficultés (!). Un troisième problème,
mais qui n’en est pas vraiment un, se met en évidence : pour pouvoir enchaîner,
il faudra prévoir deux cordes et deux assureurs. Les premiers devant être largués
-dès la sortie du toit- pour évité un tirage de mule rédhibitoire.

Pur l’instant, la voie peut facilement porter un autre nom : «OK, bloque !»,
la phrase la plus prononcée (lorsqu’elle est audible)
sur l’une des 19 dégaines en place.

P.


Depuis plus rien, si ce n’est que la baume est aujourd’hui farcie de dégaines
dans des voies qui la croisent. Il est à craindre que beaucoup de prises
y ont été taillées (!?). «Roubignolles» est entièrement naturelle et il y a 3 prises
renforcées dans «Les yeux plus gros que le ventre» : une toute petite lunule
(pour ne pas se déchirer un doigt, ou pire le déganter) / une grosse meringue
(trop importante pour que cette voie finisse en miettes) / et le petit socle
de l’unique monodoigt, que j’ai fendu au nettoyage…
Voilà.

Au revoir.

Pierre

Posté en tant qu’invité par JPB:

En fait , j’ai suggéré à C2C une série de chroniques originales sur l’escalade il y a quelque temps . Même format que sur Escalada Alsace mais du nouveau matériel .
Après quelques tentatives pour rejoindre quelqu’un par email restées sans réponses, je me suis dit que le format ne les intéressait pas du tout !!!

Des histoires , j’en ai quelques milliers dont celle-ci :

J’arrive au pied de « Calme tes nerfs » dans le secteur de « Prends ton trou » à Kamouraska .
Accompagné de deux nymphettes qui logeaient au gite où j’avait posé mon camp de base à cette époque .
Fraîche d’un gym , les nymphettes , trop jeunes pour moi mais bon , je ne parais pas mon âge … à cette époque …
Un samedi soir lové sur des coussins à charmer la pucelle de l’Île d’Orléans , beau programme …
15 m , « Calme tes nerfs » , 5b sur une quarzite blanche et équipée école mais mes espoirs ne grimpent qu’en moulinette : c’est donc à moi de monter la corde au relais .

Je badine , m’attache et fonce vers le relais ( j’ai équipé cette voie ) en pensant que je devrai sans doute pousser un peu sur leur derrière potelé pour les premiers pas . Un clip , deux clip , trois clip , quatre clip et hop! les chaînes … je me vache sur une sangle .

L’une d’elle m’a assurée avec grâce en me donnant tout le mou possible.
Je décide donc de redescendre en rappel considérant ma carrure de bûcheron (l’opposé de J-P Bouvier…).
Je remonte toute la corde , je détache mon noeud , je regarde en bas et leur crie de se tasser un peu et je lance les deux brins vers le sol .

Et je vois passer tout le paquet de corde que j’avais sur les genoux , direction le centre de la terre.

J’avais oublié de passer la corde dans les maillons …

Mes deux linottes ne regardent d’un air béat sans poser de question . Je suis l’expert !

Heureusement je traîne toujours une douzaines de dégaines avec moi et une autre sangle . Avec la sangle du relais et les dégaines , j’avais assez de jeu pour me rendre au point en dessous, refaire la manoeuvre en récupérant le max de matériel , descendre au deuxième point , refaire encore la manoeuvre et désescalader le reste avec toute la grâce permise .

Arrivé au sol , pas de questions . Je me suis un peu réchauffé (…) et je vais refaire la voie pour mettre la corde .
Non mais elles ont besoin d’une transplantation de cerveau , ces deux nouilles !!

On n’enseigne plus rien dans les salles . Et moi je suis un vieux vicieux dont les hormones disjonctent les facultés cérébrales …

Ce soir là , à la Maison des Soeurs , j’ai vidé une bonne bouteille de blanc en lisant un excellent livre .
Seul avec mon égo un peu froissé .
Maudites hormones !

Posté en tant qu’invité par J.Marc:

Vous avez mangé ? ça vaut mieux… âmes sensibles, s’abstenir !

Donc, avec mon pote, on avait repéré un rocher perdu dans la forêt des Vosges du Nord, envahi d’arbustes et de mousses en tout genre, et nous étions là pour le prospecter à des fins d’équipement.

C’était mon tour, j’avais repéré une belle fissure : on installe le relais sur un arbre, et Daniel me mouline au pied de la paroi. C’est parti, un peu laborieusement : entre la mousse, la boue et la pluie qui commence à tomber, une vraie patinette ; alors je coince tant et plus dans la fissure, jusqu’à ce qu’elle s’élargisse un peu ; pas facile de verrouiller le bras, mais je distingue comme un bloc coincé à l’intérieur ; si je l’attrape, je pourrai facilement me hisser et continuer.

Mais la fissure est bien sombre ; je tâtonne un peu avec la main droite pour coiffer ce bloc. Là, ça y est, je coiffe quelque chose… beuarrrhhh !!! C’est mou et gluant… je retire précipitamment la main - ce qui a pour effet de me faire tomber : merci la corde - et là, j’examine l’objet du délit… j’en vomirais… J’ai la main entièrement enduite d’une substance qui ne trompe pas : de la merde ! oui, tout simplement. Je vous passerai les détails concernant la couleur et l’odeur ; je dirais juste que mes qualités de détective amateur me permettent de soupçonner une provenance animale, et plus précisément d’un animal de forte taille atteint de chiasse aiguë…

Le dégoût c’est bien, mais il me faut agir, et le pote s’impatiente… j’essuie d’abord la main sur le rocher, tire un mouchoir en tissus, termine tant bien que mal un sommaire nettoyage - le mouchoir finira à la poubelle, vous pouvez en être sûr - ; et je m’apprête à finir mon ascension, agrippant cette fois les lèvres de la fissure en me gardant bien d’y pénétrer, quand de nouveau, la corde arrête ma chute : j’ai à peine le temps d’apercevoir le monstre, surgi de la fissure, qui en bondissant de côté venait de me filer une trouille dont je ne suis pas coutumier.

Après un regard circulaire pour m’assurer que désormais la voie est libre, je viens enfin à bout de cette fichue fissure, et au sommet, mon pote me presse de m’expliquer - il vient d’apercevoir ma main toute jaune !

Mon récit terminé, je lui demande :

  • Et le monstre… tu l’as vu, toi ?
  • Le monstre ? quel monstre ? Je n’ai vu qu’un chat sauvage… tu t’es vautré sur une merde de chat sauvage !!!

Et là, le Jean-Marc, un peu vexé, usera de toute l’eau de sa gourde pour tenter de faire oublier sa mésaventure.

Mais ce qui m’a le plus peiné, c’est que sans raison, à l’heure de nous séparer, mon pote n’a même pas voulu me serrer la main !

Quant au rocher… on l’a définitivement abandonné à notre hôte !

Et je vous rassure, j’ai aussi des souvenirs d’escalade plus alléchants…