Le Col des Cristaux -8- L'avalanche

Si vous avez raté le début :
1 – La montée au refuge d’Argentière
2 – Le sauvetage en crevasse
3 – La rimaye du Glacier du Milieu
4 – SOS crampons
5 – Le couloir en Y
6 – L’ascension ultime
7 – La grande pente

[u]8 – L’avalanche[/u]

Heureusement Bernard était un coéquipier compréhensif, il est redescendu jusque vers moi,
et a préparé une cuvette dans la neige pour la grosse pierre qu’il a doucement faite rouler, et qu’il a bloquée dans ce petit nid.
Ouf ! Nous pouvions continuer !
Nous sommes finalement arrivés au sommet, tout en neige, et avons prudemment rejoint par l’arête le haut de la voie normale de la Nord-Est, puis continué jusqu’aux rochers.
Les traces de nos amis étaient encore visibles, mais ils avaient continué sans nous attendre, c’était plus prudent pour eux !

Nous avons décidé une petite pause ravitaillement, et avons sorti nos boissons. A l’époque nous mettions du thé bouillant dans des gourdes alu,
chacune emmaillotée dans une grosse chaussette déclassée pour ce rôle. Le thé devenait rapidement tiède, puis froid, et on se gelait souvent les lèvres sur le goulot.
Cela m’est arrivé plus d’une fois que le liquide gèle complètement, j’en étais alors réduite à manger de la neige pour me désaltérer.
Là le thé était encore tiède, ce fut un régal bien réconfortant !

« Catherine, tu peux sortir les vivres de course, s’il te plait, c’est toi qui les as ! »
Je sortis de mon sac le paquet « ravitaillement », mais il ne contenait qu’une grosse gamelle, quatre assiettes en alu, un bleuet et sa recharge.
Après avoir farfouillé dans tous les coins et poches de chacun de nos sacs, nous avons alors fait le compte :
Il y avait eu un micmac dans la répartition des affaires de nos deux cordées,
eux avaient toute la nourriture, et nous les batteries de cuisine !
« Ce n’est pas grave, ils ont dû s’en rendre compte, ils nous auront laissé des vivres sur le trajet, c’est sûr » me rassura Bernard.
Nous n’avions plus qu’à continuer, et on s’est mis à scruter au passage tous les recoins qui auraient pu receler notre trésor. En vain…
On a fini par croquer chacun un cachet de Coramine-Glucose, il valait mieux ne pas risquer une hypoglycémie…

Le cheminement ne passe pas complètement sur le fil de l’arête, il y a de sacrés « gendarmes » que l’on contourne, dans des traversées tantôt rocheuses, tantôt en neige.
On s’assurait sérieusement depuis les rochers même pour les passages en neige, mais on faisait très attention aussi aux becquets rocheux sur lesquels on posait les sangles :
Les noms m’avaient bien fait rire lorsque l’on avait lu le topo sur le Guide Vallot : il y avait l’Aiguille Chenavier, mais aussi l’Aiguille Croulante, et l’Aiguille Qui Remue !
Bernard venait de prendre appui sur un énorme bloc, et s’apprêtait à y poser une assurance et continuer lorsqu’il a soudain fait demi-tour et m’a littéralement bondi dessus !
Il avait sauté sur mes belles Super-Guides, mais je n’eus pas le temps de rouspéter car le bloc qu’il venait d’abandonner partit dans le vide dans un grand craquement !
Là, je trouvais que les noms n’étaient plus drôles du tout, mais sûrement bien appropriés…

Malgré mon petit bout de papier sur lequel j’avais noté l’itinéraire de « l’échappatoire », on n’a pas trouvé le passage pour descendre en rappel,
mais en fait on n’a pas trop cherché, car on se demandait si l’accident n’avait pas eu lieu justement à cet endroit.
Du coup, on a continué, et on s’est finalement retrouvés devant les Aiguilles Ravanel et Mummery,
que j’avais admirées en photo grand format noir et blanc chez Tairraz.
Je les aurais reconnues entre toutes : « ça y est ! on est arrivés ! on est au Col des Cristaux ! »
Nous savions tous les deux que ce n’était pas terminé :
il y avait cette grande pente à descendre pour rejoindre le Glacier de Talèfre qui n’était pas très raide, mais la neige avait vraiment trop pris la chaleur,
et puis ensuite pour rejoindre le refuge du Couvercle, le cheminement sur glacier pouvait être dangereux, avec des ponts de neige trop mous.

C’est alors que mon coéquipier a eu une idée :
« Assure-moi bien fort, corde tendue, ça peut partir ! »
Il a fait trois pas dans la pente, et avec un pied a poussé « pour voir » un petit paquet de neige gros comme une brique de lait, c’est-à-dire un litre.
L’avalanche a démarré lentement, dans un chuintement, en s’élargissant, s’amplifiant, puis toute la face est partie en mouvement.
Bernard s’est retrouvé allongé sur le côté, arrêté par la corde et accroché à son piolet qu’il avait ancré préventivement jusqu’à la garde.
Nous sommes restés fascinés par ces coulées successives qui se recouvraient les unes les autres quatre cent mètres plus bas sur le plat du glacier,
et qui me faisaient penser aux vagues de l’océan qui s’étalent avec leur écume sur le sable. C’était magnifique !

Mais nous étions coincés !
Il aurait fallu attendre que cela regèle, d’autant plus que par endroits il nous a semblé que de belles accumulations s’étaient formées,
arrêtées par des amas rocheux et des bombements dans la pente.
Mais nous n’avions rien pour bivouaquer…
Nous avions maintes fois bivouaqué, mais c’était en forêt de Fontainebleau, ou Rambouillet, avec les scouts,
et nos plus grandes peurs étaient causées par les bruits des sangliers, cerfs, chouettes ou hiboux !
Là c’était différent, nous avions tout simplement peur de mourir de froid !
Nous étions à plus de 3600m d’altitude, et comme c’était un col nous étions en plein vent, mais nous n’osions plus faire un pas.

Nous nous sommes dit que nos amis avaient dû prévenir les secours, et qu’un hélicoptère viendrait sûrement nous survoler.
J’ai demandé : « Combien ça peut coûter pour se faire redescendre dans la vallée par hélico ? Il doit y avoir une réduction avec nos cartes CAF ?».
A cet instant j’aurais donné très cher pour ne plus être là-haut.

(à suivre…)

La suite est là : 9- Le bivouac

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La suite :slight_smile:

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J’essaie …

On ne tient plus … :mad: